Forêt pluviale tempérée de Chun T'oh Whudujut

On continue de découvrir de nouveaux types d'habitats hébergeant la vie. Récemment on a annoncé la découverte d'une vie animale sous le plancher océanique située près de sources hydrothermales. Plusieurs spécimens de vers tubicoles ont pu être observés dans une fissure de basalte localisée à environ 10 cm sous la surface du fond marin. Jusqu'ici on pensait que seule une vie microbienne pouvait être présente dans la roche à cette profondeur.

La nature nous réservait encore d'autres surprises. On peut s'étonner de voir ici l'expression «écosystèmes hybrides». Un écosystème, quelle que soit sa complexité, ne devrait pas s'hybrider. Donnons-en une définition. Un écosystème hybride est un habitat naturel dans lequel cohabitent des espèces adaptées à différentes zones climatiques. Cette définition peut surprendre, elle nous conduit à imaginer que des caractéristiques d'au moins deux zones climatiques bien distinctes se retrouvent dans un même endroit. C'est pourtant ce qu'ont observé des biologistes en Colombie-Britannique. Le premier exemple de ce type d'habitat a été localisé à la jonction de deux chaînes de montagnes, la cordillère des Rocheuses et celle du Columbia. Sur les rives du Haut-Fraser se trouve le parc provincial de Chun T'oh Whudujut. Ce milieu naturel est une forêt pluviale tempérée située à l'intérieur des terres. Ce qui est remarquable tient au fait que le «sous-étage de cette forêt, et même sa canopée, s'est révélé être un mélange d'espèces sensibles provenant de deux écosystèmes distincts et éloignés : la forêt tempérée côtière du nord-ouest du Pacifique et la forêt boréale à l'est des Rocheuses.» Les biologistes se sont étonnés de trouver une forêt pluviale tempérée à 800 kilomètres du Pacifique. Et ce n'est pas la seule.

Toujours en Colombie-Britannique, en 2023, le biologiste Curtis Björk explore la vallée de la rivière Walker et y découvre un autre habitat naturel où vivent des espèces végétales qui font appel aux caractéristiques des deux zones climatiques mentionnées. Il décrit cette région comme «...une tapisserie d'écosystèmes imbriqués intimement liés aux zones qui l'entourent». La fonte des neiges en provenance des chaînes de montagnes environnantes combinée à la rétention efficace par le sol de cette eau explique que l'on retrouve la présence d'espèces peuplant une forêt pluviale côtoyant du même coup des plantes et arbres de la forêt boréale.

L'évolution des écosystèmes

Depuis Darwin, on s'est beaucoup interrogé et on a beaucoup étudié l'évolution des espèces. Ce n'est que plus récemment qu'on a prêté attention à celle des écosystèmes. Si l'évolution des écosystèmes actuels de la planète ne doit pas être négligée, celle de ceux du passé mérite tout autant d'être étudiée et comprise. De la diversification des espèces, on en vient à s'interroger, par extension, à la diversification des écosystèmes. Comment se sont-ils diversifiés? Plusieurs disciplines ont uni leurs efforts pour nous livrer, en plusieurs tableaux, l'histoire de notre planète et commencé à apporter du même coup une réponse à cette dernière question. Au Carbonifère par exemple (360 à 300 millions d'années), la forêt tropicale, qui couvrait une grande partie de la masse continentale, a fait place petit à petit à plusieurs environnements isolés les uns des autres abritant leur propre faune qu'on ne retrouvait nulle part ailleurs favorisant ainsi l'émergence du phénomène que les biologistes nomment l'endémisme.

Chun T'oh Whudujut et les autres milieux du même genre qu'on retrouve dans l'actuelle Colombie-Britannique nous montrent que la diversification des milieux naturels est toujours en marche à notre époque par des mécanismes qui font apparaître des écosystèmes hybrides.

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