Les églises passent au vert. C’est du moins l’intention derrière le colloque œcuménique des « Églises vertes » qui avait lieu le 9 février à l’Église Saint-Charles à Montréal. Déjà, un tel événement pique la curiosité. Mais quand le conférencier, André Beauchamp, se présente comme théologien et environnementaliste, on se demande à quel oiseau rare on a affaire.

Rare, cela ne fait aucun doute. Pourtant, son expertise est indéniable et « ses » vocations ne datent pas d’hier. Le prêtre de 72 ans défend la cause environnementale depuis une trentaine d’années. Dans les années 80, il a été secrétaire général du ministère de l’Environnement du Québec et a dirigé le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement. Il a plusieurs commissions à son actif dont la dernière en titre est la Commission sur la gestion de l’eau. Il a publié une vingtaine d’ouvrages et quelque 200 articles sur l’environnement, l’éthique, mais aussi sur la théologie. Depuis 2003, André Beauchamp dirige son propre bureau d’expert-conseil en environnement.

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Prêtre sans nomination pastorale, c’est-à-dire non attaché à une paroisse, André Beauchamp a pratiqué la prêtrise et le fonctionnariat de façon parallèle. Curieusement, jamais le haut clergé ne s’est opposé à sa carrière dans la fonction publique. « Il faut dire que je n’ai jamais demandé la permission. Ils me l’auraient certainement interdit », ajoute-t-il avec un sourire. En 1978, le gouvernement du Québec avait besoin d’un expert pour monter un module d’éducation aux adultes en environnement pour le futur ministère de l’Environnement. On a fait appel aux compétences d’André Beauchamp en pédagogie de la catéchèse pour adultes. Son expertise en environnement s’est bâtie sur le tas. La passion a suivi. Elle l’habite toujours aussi intensément aujourd’hui.

Mais n’allez surtout pas dire à ce prêtre environnementaliste qu’il « prêche pour sa paroisse ». Pour le haut fonctionnaire, la neutralité tous azimuts était de mise. Le risque d’être targué d’évangéliste des questions environnementales et d’y laisser sa crédibilité commandait la discrétion sur sa vocation spirituelle. « Dans les années 80, explique-t-il, la religion avait pris le bord. La société québécoise était devenue séculière. Ça, je le comprenais et l’acceptais très bien. Les gens se méfiaient des religieux. Mon statut de prêtre n’a jamais été un secret, mais disons que je ne m’annonçais pas comme tel. »

André Beauchamp admet qu’aujourd’hui, il affiche plus ouvertement son appartenance au clergé catholique en même temps que son expertise en matière d’environnement. Le lien entre religion et protection de l’environnement devrait d’ailleurs aller de soi selon lui : il en a fait l’objet de sa conférence au premier Colloque des églises vertes.

Le spécialiste s’est adressé à un auditoire d’une centaine de personnes, composé d’un fort contingent des différents diocèses catholiques de Montréal et des environs et de plusieurs membres des églises unies, presbytériennes, anglicanes et orthodoxes. Les participants étaient surtout des animateurs de pastorales, quelques représentants religieux et des laïcs souhaitant faire bouger les choses dans leur communauté.

Venu apporter son soutien et son expertise, André Beauchamp a salué l’initiative de ce premier rassemblement œcuménique québécois autour de la question de la protection de l’environnement. Le colloque visait la recherche et la mise en commun de solutions écologiques, soit de petites actions simples comme le recyclage, l’utilisation d’autos communautaires ou le compostage autant que des solutions à long terme comme de nouvelles installations de chauffage à énergies vertes dans les immeubles religieux. Le projet œcuménique espère aussi jeter les bases d’une certification « Église verte ». À ce jour, près de la moitié des Églises unies du Québec, soit huit sur 17, pour la plupart de Montréal, sont membres d’Église verte. Du côté catholique, seulement quatre églises ont franchi le même pas.

Selon M Beauchamp, ce chantier pastoral est un résultat direct de l’effort et du travail de la base. Il souligne qu’il y a une quinzaine d’années, les communautés religieuses faisaient déjà appel à lui pour développer des façons de faire plus écologiques. Par ailleurs, le prêtre séculier est très critique face à l’attitude du haut clergé sur cette question. Il déplore que le pape mette tant d’énergie sur des questions comme la sexualité, la charité, la piété, alors que la crise écologique sévit et qu’elle pose de très sérieuses questions éthiques à l’humanité.

D’après André Beauchamp, il est temps que l’Église catholique prenne conscience de l’urgence de protéger cette planète et « qu’elle joue son rôle de locomotive dans le débat sans tomber dans un moralisme étouffant ».

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