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En fin de compte, les études sur une souche inquiétante de la grippe H5N1 pourraient être bientôt publiées dans leur totalité. Le couvercle sur la marmite n’aura tenu que quelques mois.

Le gouvernement américain alléguait depuis deux mois l'existence d'un risque pour la sécurité: en publiant les données complètes sur ce virus créé en laboratoire, des terroristes seraient capables de créer une épidémie contre laquelle nul n’aurait de médicament. Les experts rétorquaient qu’au contraire, la meilleure assurance qu’un médicament soit mis au point réside dans une large circulation de l’information: plus nombreux sont les spécialistes en virus à avoir accès aux données, et plus élevées sont les chances de créer une parade.

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Le 20 décembre, il avait été décidé, après bien des discussions de coulisses, que deux articles en instance de publication dans Nature et Science seraient publiés, mais que les données les plus «sensibles» seraient mises sur la glace jusqu’à nouvel ordre. Vendredi dernier, un comité de 22 experts de plusieurs pays réuni par l’Organisation mondiale de la santé à Genève a tranché autrement: les risques théoriques que ce virus soit un jour créé par des terroristes sont de loin inférieurs aux «risques réels et présents» que le H5N1 actuel ne subisse une mutation tout à fait naturelle qui le rendrait tout aussi dangereux que sa version créée en laboratoire.

Mutations tranquilles

Rappelons qu’à l’origine de cette histoire, il y a une double recherche, aux États-Unis et aux Pays-Bas: en septembre dernier, des informations ont commencé à filtrer comme quoi deux groupes distincts auraient produit une souche de grippe aviaire —le H5N1— qui s’avérait hautement transmissible entre des furets. Dans l’arbre généalogique des espèces, cela signifie que la transmission entre humains est à deux doigts d’être possible.

Et cette mutation qu’ils ont créé en laboratoire, elle pourrait tout aussi bien se produire dans la nature. Il y a des années que les experts évoquent le risque qu’un jour, le virus de la grippe aviaire ne subisse une mutation qui lui permettrait de se transmettre d’humain à humain. Depuis plus d'une décennie, ce virus a démontré sa capacité à se transmettre de volatile à humain, mais dans quelques rares cas seulement —et jamais d’humain à humain, à notre connaissance.

«Le consensus du groupe, c’est qu’il était beaucoup plus important d’apporter cette information aux scientifiques d’une façon qui leur permette de travailler sur le problème, pour le bien de la santé publique», a résumé le spécialiste en maladies infectieuses Anthony S. Fauci, qui représentait les États-Unis à cette rencontre. «Ce n’était pas unanime, mais c’était un fort consensus.»

Le New Scientist signale que parmi les 22 experts réunis à Genève, au moins la moitié sont des chercheurs engagés dans la lutte contre la grippe, et qu’aucun n’était identifié comme un expert en biosécurité. Mais peut-être plus important encore, le groupe incluait aussi des experts en santé publique d’Indonésie et du Vietnam, là où se sont majoritairement produits les décès causés par la grippe aviaire, et par conséquent, là où une mutation naturelle de cette grippe risquerait de frapper le plus fort.

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