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L’ouvrage qu’on décrit sans cesse comme la «bible» des maladies mentales, et dont la nouvelle édition, après des années d’attente, doit paraître ce mois-ci, vient d’être écarté par rien de moins que le plus gros organisme subventionnaire de la recherche sur les maladies mentales au monde.

Dans son dernier billet, le directeur de l’Institut américain des maladies mentales (NIMH), Thomas Insel, annonce une réorientation «des recherches au-delà des catégories» telles que définies par le DSM-5 —Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders, cinquième édition.

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Le DSM est, depuis des décennies, l’ouvrage de référence pour définir et catégoriser ce qui est une maladie mentale: symptômes et traitements. La parution imminente de la 5e édition —14 ans après la précédente— a provoqué depuis trois ans plusieurs débats houleux, tournant autour des deux mêmes réalités: la croissance du nombre de «maladies» d’une édition à l’autre (plus de 300 dans l’actuelle édition) et le caractère subjectif des définitions. Bien que, en contrepartie, la 5e édition ait tout de même resserré certains termes, le plus connu des changements étant le «spectre de l’autisme», qui regroupe désormais le syndrome de l’Asperger plutôt que de le maintenir comme pathologie distincte. (lire aussi: Quels sont les critères pour être sain d’esprit?)

Mais le virage annoncé par l’Institut américain des maladies mentales place l’éditeur du DSM —l’Association américaine des psychiatres— dans une position très inconfortable, à seulement deux semaines de la parution. Dans les mots du directeur du NIHM :

Nous soutiendrons des projets de recherches qui regardent au-delà des catégories actuelles —ou qui subdiviserons les catégories actuelles— pour commencer à développer un meilleur système.

Le désaveu du DSM ne peut pas être plus fort, le directeur Thomas Insel ajoutant que «les patients souffrant de problèmes mentaux méritent mieux».

Pourtant, ce désaveu n’est pas aussi inattendu qu’il en a l’air: au cours des 30 dernières années, la compréhension du cerveau a fait des bonds de géant grâce à la neurologie, mais parallèlement, la façon traditionnelle de définir une maladie mentale est demeurée ancrée dans un flou d’un autre siècle, reproche le psychiatre retraité Allen Frances, critique de longue date du DSM.

La nouvelle édition du DSM «néglige la biologie des maladies mentales», résumait le mois dernier le journaliste Ferris Jabr, dans le Scientific American. «Les biologistes ont été incapables de trouver des preuves génétiques ou neuroscientifiques qui soutiendraient la séparation de désordres mentaux complexes» en catégories telles que celles privilégiées par le DSM, renchérissait en même temps un dossier de la revue Nature.

La prochaine étape pourrait se jouer du 18 au 22 mai à San Francisco, au congrès annuel de l’Association américaine de psychiatrie, où la cinquième édition du DSM doit être officiellement lancée.

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