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RALEIGH, Caroline du Nord - Après huit éditions, la plus importante rencontre internationale sur la communication scientifique à l’ère numérique, montre deux signes de passage à l’âge adulte: elle se tiendra l’an prochain pour la première fois hors de son lieu d’origine.

Et elle tente de naviguer à travers les remous causés par les accusations de harcèlement sexuel qui ont provoqué le départ de son fondateur.

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La directrice de l’organisme Science Online, qui chapeaute le congrès du même nom, Karyn Traphagen, a fait l’annonce du changement de lieu lors de la plénière de clôture, le 1er mars: le congrès aura lieu l’an prochain à Atlanta, à l’université Georgia Tech, du 18 au 21 février.

Science Online est un congrès consacré aux nouveaux outils pour communiquer la science —blogues, Twitter, multimédia, et toutes les remises en question qui viennent avec. Il réunissait à Raleigh, du 27 février au 1er mars, 450 personnes: des scientifiques passionnés de vulgarisation —dont beaucoup de blogueurs— des journalistes et des communicateurs d’institutions —universités, centres de recherche, musées. L’événement était né en 2007 à Raleigh de quelques dizaines de blogueurs de Caroline du Nord —et s’appelait alors simplement « congrès des blogueurs de science de Caroline du Nord ». Depuis, il n’a jamais quitté Raleigh, en dépit d’un succès d’estime qui s’est étendu à une communauté des quatre coins des États-Unis et au-delà.

« À la base, une communauté, ce sont des gens avec un intérêt commun », a résumé la Britannique Loo Woodley, une scientifique passée dans le camp des communicatrices. Woodley animait samedi un atelier tentant de définir ce qu’est une communauté à l’ère virtuelle. Or, le succès de Science Online a beau avoir été souvent défini par sa capacité à créer une communauté, les participants à cet atelier ont été incapables de définir ce qui a permis ce succès —ou ce qui devrait être l’étape suivante.

Au moins un groupe aurait bien aimé avoir cette recette : les blogueurs canadiens rassemblés depuis cette année sous l’agrégateur de contenu Science Borealis, qui ont été très actifs pendant la fin de semaine, sur le plancher et sur Twitter.

Le fantôme Bora

La solidité de la communauté Science Online a été mise à l’épreuve cette année, à la suite du départ du scientifique et blogueur Bora Zivcovic. Celui-ci était non seulement le cofondateur et administrateur de Science Online, mais l’un de ses artisans les plus prolifiques, au point de s’être mérité le qualificatif de « blogfather ». L’automne dernier, trois blogueuses ont révélé avoir été l’objet d’avances déplacées. Zivcovic, qui a également abandonné ses fonctions d’éditeur des blogues du Scientific American, était absent du congrès, mais son fantôme rôdait : au cours d’un atelier, jeudi matin, consacré au harcèlement sexuel en général, quelques-uns se sont étonnés tout haut que les organisateurs se contentent de parler de «récents événements». Puisant dans le répertoire d’Harry Potter, le communicateur scientifique Scott Lewis a demandé sur Twitter: «est-ce que Bora serait notre Voldemort, celui-dont-le-nom-ne-peut-pas-être-prononcé?» Les discussions sont devenues explicites, et s’est même ajoutée à l’horaire une session créée spontanément par des participantes désireuses de crever l’abcès.

Faisant le bilan de cette dernière session, appelée #ScioSafe sur Twitter, la philosophe et blogueuse Janet Stemwedel a souligné combien ces événements pourraient être bénéfiques: «nous avons le sentiment qu’il faut une plus grande confiance envers la direction de cette organisation, parce que la communauté et l’organisation ne sont pas exactement la même chose.»

La crise a aussi eu pour conséquence que le congrès s’est doté d’une politique de tolérance zéro à l’égard du harcèlement, chose dont peu de congrès semblent pouvoir se targuer.

Un réseau en expansion

Quant à Karyn Traphagen, elle a mis l’accent, en introduction et en conclusion, sur le fait que Science Online est non seulement davantage que ses fondateurs, mais davantage que son congrès annuel : il existe à présent des conférences «satellites», ScioClimate et ScioOceans; ScioBrain sera lancé en juillet à l’Université de Californie. Dans une dizaine de villes, d’autres «membres» de la communauté organisent irrégulièrement des rencontres portant l’étiquette SciO. Et enfin, la 8e édition de l’anthologie des meilleurs blogues de science du monde anglophone, The Open Laboratory , vient de paraître en format numérique. Des projets qui font rêver ceux qui bloguent dans des langues autres que l’anglais...

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