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Bonne compréhension des concepts scientifiques, intérêt marqué pour la recherche scientifique, le portrait de la culture scientifique canadienne dressé dans le récent rapport Culture scientifique : qu’en est-il au Canada? se révèle très positif.

Publié par le Conseil des académies canadiennes, à la demande de la Société des musées de sciences et technologies du Canada, Industrie Canada et Ressources naturelles Canada, ce document rapporte les résultats d’un sondage mené en avril 2013 auprès de 2 000 Canadiens.

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« Il s'agit d'une photo instantanée très positive de la culture scientifique canadienne. Son pouls devrait cependant être pris plus régulièrement pour savoir si sa santé est aussi bonne que l’on le pense », tempère toutefois Bernard Schiele, chercheur au Centre interuniversitaire de recherche sur la science et la technologie (CIRST) et membre du comité d’experts sur l’état de la culture scientifique au Canada.

L'exercice — cerner l’état de la culture scientifique au Canada — n’avait pas été en effet tenté depuis 25 ans, la dernière étude du genre remontant à 1989. « Il s’agissait alors d’une étude très ancienne et partielle menée par une université. Il est difficile de comparer les deux exercices », relève le chercheur.

Culture scientifique en progrès

Ce rapport dresse aussi un inventaire des forces canadiennes en matière de culture scientifique. Plus de 700 programmes et organismes œuvrent à faire rayonner la science auprès des citoyens du pays. Le Canada possède aussi un bon réseau de centres et de musées de science, sans compter des émissions scientifiques connues et appréciées par le public.

Le Canada bénéficie donc d’un large bassin de producteurs de culture scientifique. « Dans la presse, par contre, ça reste limité à quelques reporters scientifiques. Le Canada manque aussi d’un programme national dédié à l’éducation informelle en science », soutient de son côté Tamara Franz-Odendaal, biologiste et titulaire de la Chaire pour les femmes en sciences et génie du CRSNG (région de l’Atlantique) et membre du comité de réflexion.

Les Canadiens sont au rendez-vous des médiateurs de science : 93 % se disent très ou modérément intéressés par les nouvelles découvertes scientifiques et les avancées technologiques — ils se positionnent ainsi au premier rang des citoyens de 33 pays.

La majorité des Canadiens tranchent donc en faveur de la science et démontrent même le taux de réserve le plus bas face à la science et à la technologie des 17 pays industrialisés, devant les Pays-Bas, l’Australie ou la Suède. Ce qui ne les empêche pas d’être sceptiques quant à la capacité de la science et de la technologie de résoudre des problèmes sociaux.

Sur le podium de la littératie scientifique

Les Canadiens n’ont rien à envier à leurs voisins et affichent de bonnes connaissances en science et en technologie décrochant ainsi la première place à l’index de littératie scientifique devant la Suède, les États-Unis et les Pays-Bas.

Avec 42 % de sa population dotée d’un niveau élémentaire en connaissances scientifiques, le Canada fait bonne figure. « Oui, le Canada se place en première place, mais certaines données font réfléchir : moins d’un tiers des Canadiens sont capables de décrire une molécule dans leurs propres mots et moins de la moitié peuvent décrire la méthode scientifique expérimentale, ça pourrait être mieux! De même, les femmes sont sous-représentées dans de nombreux domaines de la science », relève néanmoins Mme Franz-Odendaal.

Sans compter que le niveau de littératie des femmes (32 %) n’atteint pas celui des hommes (53 %). Il existe également des disparités entre les provinces : les répondants québécois arrivent bien en deçà de la moyenne avec seulement 26 %. Même si la culture scientifique s’améliore, de nombreux Canadiens n'ont pas le niveau de compréhension nécessaire pour participer aux débats publics sur le sujet.

Le rapport souligne aussi deux autres points préoccupants : une baisse des résultats des élèves canadiens au Programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA) en science et en mathématiques depuis 2006 – même si les Québécois tirent mieux leur épingle du jeu. Et le nombre relativement modeste de diplômés en sciences et technologie — un Canadien sur 5 seulement possède un diplôme en science.

L’effet pervers d’être en bonne santé

Le rapport détaille dans ses pages les nombreuses incidences d’une culture scientifique vigoureuse – sur l’économie, la recherche scientifique, l’engagement démocratique et même les individus et identifie les pistes pour soutenir cet indispensable savoir du XXIe siècle : du soutien à l’apprentissage continu à l’adaptation aux nouvelles technologies, en passant par la nécessité d’un leadership régional et national.

Alors que le gouvernement fédéral coupe dans de nombreux programmes scientifiques, oriente la recherche dans des visées économiques et musèle même ses chercheurs, de nombreux observateurs s’interrogent toutefois sur l’avenir de cette culture scientifique, particulièrement auprès des jeunes.

Le comité d’experts souligne, bien que son mandat n'était pas de faire des recommandations au gouvernement, que ce dernier n’a pas été aussi actif que ceux d'autres pays pour formuler une vision nationale en matière de culture scientifique.

« Il faut se souvenir que la culture scientifique et les fonds pour la recherche scientifique (ou les bibliothèques) sont des choses séparées. Le travail du comité était d’analyser la culture scientifique et non pas d’évaluer les politiques gouvernementales bien que je pense que le Canada pourrait apprendre beaucoup des initiatives des autres pays », relève Mme Franz-Odendaal.

Il serait dommage que ce rapport très étoffé sur l’état de santé de la culture scientifique canadienne engendre l’immobilisme du gouvernement. « La crainte du comité était de délivrer un mauvais message. Ce qu’il faut lire c’est : tout va bien et il faut poursuivre la promotion et la valorisation de la culture scientifique », soutient de son côté Bernard Schiele.

L’abandon du développement de la culture scientifique risquerait de porter préjudices à des années d’efforts du milieu très dépendant des fonds publics. Si aujourd’hui la culture scientifique se porte bien, il ne faut pas se reposer sur ces lauriers, mais au contraire poursuivre dans les tentatives de rapprochement entre la science et les citoyens canadiens.

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