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Oui, les détenteurs d’un doctorat sont peu nombreux à décrocher un emploi dans une université. Mais on aurait tort de croire qu’ils l’ignorent. Ils savent qu’ils sont à risque de se retrouver dans un marché du travail où ils seront surqualifiés, mais ils y vont quand même.

C’est un des constats qui se dégageait du panel sur « l’employabilité des doctorants » tenu cette semaine au congrès de l’Acfas. « Seulement 6 à 30 % des doctorants décrocheront un poste de prof à l’Université », rappelle Simon Bousquet, du MITACS, un organisme dont un des objectifs est de favoriser les partenariats entre universités et entreprises. Il y a une « détérioration relative de la situation dans le temps » renchérit Mircea Vultur, professeur à l’INRS. On assiste même, poursuit-il, à un élargissement des inégalités : 16 % des diplômés universitaires canadiens sont dans la catégorie des revenus les plus faibles (moins de 17 000 $ par an). Et sur l’ensemble du marché du travail, le nombre de travailleurs surqualifiés aurait doublé depuis 1990, atteignant 36 %. Uniquement chez les diplômés d’études supérieures, il serait de 20 %. En sciences sociales, de 44 %.

Toutefois, la surprise réside dans le fait que les doctorants en sont conscients. Ils sont conscients, par exemple, qu’ils sont mal préparés à entrer sur le marché du travail, notent Élise Saint-Jacques et Guylaine Dubreuil dans un portrait des doctorants de Polytechnique. Ils ne savent pas comment approcher un employeur, ils ont une méconnaissance du marché et ils ont « tendance à se dévaluer », appuie Laurence Theunis, de l’Université libre de Bruxelles. Et dans certains cas, le poste de prof d’université n’intéresse même pas ces doctorants, ajoute Jean-Claude Coallier, de l’Université de Sherbrooke : selon sa petite enquête auprès de 30 doctorants et diplômés en sciences de l’éducation, une attitude qui revient souvent pourrait être résumée par : « je ne sais pas ce que je peux et veux faire avec ça ». Ils prolongent leurs études, mais ignorent où ils seront ensuite, voire s’en désintéressent. Une enquête plus large Québec-Liban est en cours.

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Mircea Vultur présente ce phénomène d’une autre façon : les études sont vues comme une « consommation » et non comme un « investissement ». Il est donc normal que les diplômés soient plus nombreux à être surqualifiés.

Mais il en ressort aussi qu’à ses yeux, le lien entre la croissance du nombre de diplômés universitaires et la croissance économique relève du mythe. « La société du savoir n’est qu’une des conditions de la croissance », dit-il. Certes, les diplômés universitaires vont, en moyenne, gagner davantage que les non-diplômés, mais « si le gâteau général diminue », ça diminue pour tout le monde.

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