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Le monde est en guerre contre la COVID, « et la COVID est en train de gagner ». C'est le titre pessimiste choisi par une chroniqueuse du New York Times pour décrire une réalité souvent oubliée: la chaîne d’approvisionnements des vaccins.

Il ne suffit en effet pas de dire que les pays riches devraient faire leur part pour donner davantage de vaccins aux pays en voie de développement. Encore faut-il que ces vaccins arrivent là où ils doivent arriver. Il faut entre autres des cuves géantes très coûteuses que seuls quelques manufacturiers produisent dans le monde. Et il faut, surtout, de la volonté gouvernementale.

Dans des situations normales, écrit Jeneen Interlendi, « les compagnies pharmaceutiques savent comment coordonner leur chaîne mondiale d’approvisionnement. Elles savent aussi comment se coordonner pour sécuriser les ressources dont elles ont besoin pour fabriquer leurs produits ». Mais dans l’actuelle situation d’urgence, il faut aussi des acteurs politiques capables de se mobiliser, parce qu’eux seuls peuvent obliger ces compagnies à rediriger leurs chaînes de production, ou à débloquer leurs brevets. Seuls les acteurs politiques peuvent éliminer les barrières à l’exportation de produits médicaux ou débloquer les fonds pour décentraliser la production des vaccins. Et c’est dans cette partie politique du problème que la planète a échoué le test ces derniers mois.

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Ce n’est pas la première fois qu’est utilisée la métaphore d’une guerre dans laquelle le virus aurait l’avantage: dès avril, le directeur de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) rappelait que les pays riches avaient la capacité de mettre fin à cette pandémie, s’ils respectaient leurs promesses. Au début de septembre, le directeur pour l’Afrique de l’OMS implorait les pays riches de retarder l’éventuelle troisième dose et d’offrir plutôt un maximum de premières doses aux pays qui en ont un urgent besoin.

En juin dernier, la Banque mondiale et le Fonds monétaire international avaient lancé un appel aux pays riches pour qu’ils accroissent leurs dons au consortium de partage des vaccins Covax. Trois mois se sont écoulés ensuite sans annonce majeure en ce sens, jusqu’à la rencontre organisée la semaine dernière par le président américain Joe Biden, au cours de laquelle les États-Unis et l’Europe ont promis d’acheter un milliard de doses d’ici 2022 pour les pays du Sud.

Le printemps dernier, Covax espérait pouvoir envoyer 2 milliards de doses dans ces pays d’ici la fin de l’année. En septembre, le consortium a ramené ses ambitions à 1,4 milliard, et il n’est pas certain que cet objectif soit atteint, même avec les nouvelles promesses. À l’échelle mondiale, 80% des doses de vaccins jusqu’ici distribuées (plus de 5 milliards et demi) l’ont été essentiellement dans les dizaines de pays les plus riches.

Rappelons que tant que le virus circule dans de larges portions de la planète, même les pays les mieux vaccinés ne sont pas à l’abri. Comme les 22 derniers mois l’ont démontré, plus ce coronavirus aura d’opportunités pour se multiplier, et plus le risque de voir émerger de nouveaux variants restera élevé —y compris, dans le scénario du pire, des variants qui seraient résistants aux vaccins actuels.

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