Jeunes et écrans

Le milliardaire Elon Musk a annoncé qu’il paierait les frais légaux d’une Canadienne contre ceux qui, dit-il, veulent la censurer, oubliant toutefois de dire que la poursuite judiciaire déposée par cette personne avait pour but de faire taire ceux qui la critiquaient. 

Kulvinder Kaur Gill est docteure en médecine à Brampton, Ontario, et avait publié en 2020 sur Twitter, aujourd’hui appelé X, des messages mettant en doute l’utilité des vaccins (qui n’existaient pas encore) contre la COVID, et plus largement, l’utilité des mesures sanitaires contre la COVID. Cela lui avait valu de nombreuses critiques de ses collègues de la communauté médicale, critiques qui avaient été bien couvertes par les médias. En réponse, elle avait déposé en décembre 2020 une poursuite en justice contre 23 médecins, journalistes et médias, alléguant qu’il s’agissait de diffamation. 

Le juge a rejeté sa poursuite en novembre 2022 en vertu de la loi dite « anti-SLAPP » (strategic lawsuits against public participation), destinée à empêcher des lanceurs d’alerte d’être réduits au silence par des poursuites coûteuses et abusives. La Dr Gill est allée en appel et sa cause, ciblant cette fois quatre défendants (dont le journaliste scientifique André Picard, du Globe and Mail), a de nouveau été rejetée par la Cour d’appel de l’Ontario, en février dernier. Gill a été condamnée à payer les frais légaux de ses vis-à-vis, soit 300 000$. 

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Ce sont ces frais que X a annoncé, dans un message publié le 24 mars, qu’il serait « fier » de payer pour « aider à défendre » la Dr Gill contre ce que la compagnie, ou son président, appelle « les efforts soutenus par le gouvernement pour annuler son discours » (en anglais, cancel her speech). Ironiquement, ces gens qu’elle voulait faire taire avaient souvent eux-mêmes publié leurs réactions sur la plateforme Twitter. 

Coïncidence, cette action d’Elon Musk est survenue une journée avant une défaite au tribunal, portant également sur une question de liberté d’expression. La compagnie X avait poursuivi en septembre 2023 un organisme américain à but non lucratif, le Center for Countering Digital Hate, pour ses analyses montrant une hausse des propos haineux sur Twitter.  Là encore, le juge a invoqué une loi « anti-SLAPP », en vigueur en Californie, pour rejeter la poursuite.

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