Plusieurs sites internet et médias affirment qu’il est possible de « booster » son système immunitaire pour mieux faire face à la Covid-19. La réponse courte du Détecteur de rumeurs: le système immunitaire ne fonctionne pas comme ça.
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L’origine de la rumeur
L’idée n’est pas née avec la pandémie. Il suffit de googler « booster son système immunitaire » pour tomber sur les conseils d’usage, affichés depuis longtemps : faire de l’exercice, manger sainement, se laver les mains, ne pas fumer, boire moins d’alcool, avoir une bonne qualité de sommeil, éviter les situations stressantes… Tous ces conseils sont judicieux.
Mais il ne faut pas chercher longtemps pour trouver aussi, en plus, une foule de produits miracles censés fortifier nos défenses ou « énergiser » notre système immunitaire. Les plus populaires à ce chapitre sont les probiotiques, les huiles essentielles, les antioxydants, la vitamine D, l’échinacée, la propolis, les extraits de pépins de pamplemousse, l’ail, la spiruline, le zinc, les oligo-éléments, les oméga-3, ou des champignons comme le shiitake, le maïtaké ou le reishi.
C’est souvent en vertu de ces hypothétiques propriétés que ces mêmes produits sont, à présent, vantés pour leur « efficacité » contre le nouveau coronavirus.
Les faits
L’erreur de base que commettent bien des gens, comme le rappelle le site de vulgarisation Allo docteurs, est de confondre le système immunitaire avec un muscle qu’il suffirait de renforcer. Or, notre système immunitaire est plutôt un ensemble complexe d’éléments: des centaines de molécules organisées en plusieurs lignes de défense, innées et adaptatives, qui vont réagir différemment suivant les circonstances. Par exemple, dans le cas du coronavirus, il ne suffirait pas de « stimuler » notre système immunitaire pour qu’il se mette soudain à produire davantage d’anticorps: il faudrait que ces anticorps soient spécifiques à ce virus. Et cela, seulement deux choses le permettent: avoir déjà été exposé à ce virus, ou bien un vaccin.
Du coup, l’efficacité d’aucun des produits censés augmenter la résistance du système immunitaire n’a été prouvée, et ce n’est pas faute d’avoir essayé: de nombreux chercheurs se sont penchés sur cette question au fil des décennies.
Par exemple, une étude américaine remontant à 2003 ne démontrait aucun effet de produits comme l’échinacée, le ginseng et l’astragale, sur le système immunitaire. Elle faisait la revue de quelques dizaines d’études cliniques randomisées effectuées un peu partout dans le monde, qui ne révélaient aucun effet, ou des effets minimes. Les chercheurs doutaient également de la qualité de certains travaux, soit parce que la production des médicaments n’était pas standardisée (c’est-à-dire que le niveau de médicament variait dans les échantillons), soit à cause d’un trop petit nombre de participants. Dans certains cas, le médicament ne contenait même pas les molécules de la plante!
En théorie, on pourrait imaginer qu’un produit ne cible qu’une partie spécifique du système immunitaire: c’est l’argument des défenseurs des antioxydants et des probiotiques, qui prétendent qu’ils « stimulent » les défenses contre les infections bactériennes, au point de réduire la durée d’une infection. Rien dans l’état actuel des connaissances ne permet de l’affirmer, bien que les probiotiques aient obtenu quelques résultats favorables, mais mitigés, contre les infections respiratoires.
Cette théorie ouvre toutefois la porte à un autre obstacle: un système immunitaire qui réagit trop fort à un « ennemi », peut devenir un véritable problème —bénin, comme les allergies, ou plus grave, comme des problèmes respiratoires. Dans les cas extrêmes, on parle de maladies auto-immunes: lorsque le système immunitaire n’attaque plus seulement un ennemi extérieur, mais son propre corps.
Depuis le début de la pandémie, on a observé chez plusieurs des malades qui se sont retrouvés aux soins intensifs des problèmes inflammatoires qui ne sont pas couramment associés à une infection virale, et qui seraient liés à une trop forte réponse du système immunitaire (on parle de « tempête de cytokines »). De nombreuses recherches essaient encore de comprendre les mécanismes.
Dans son livre sur le système immunitaire paru en 2010, le Dr Michael Starnbach, professeur de microbiologie et de génétique moléculaire à Harvard, rappelait lui aussi qu’un système immunitaire hyperactif pourrait mener à des maladies auto-immunes, comme le lupus, l’arthrite rhumatoïde, le diabète et la sclérose en plaques.