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Depuis le début de la pandémie, la COVID a été décrétée « moins pire que » à de très nombreuses reprises. Toutes sortes de tableaux la comparant avec toutes sortes d’autres causes de mortalité ont circulé sur les réseaux sociaux, dans le but de minimiser la gravité de la pandémie.  Le Détecteur de rumeurs constate que presque toutes ces comparaisons ont rapidement été désuètes.


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En date du 20 octobre 2020, la COVID-19 a officiellement fait plus de 1,1 million de victimes 

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La COVID, c’est moins pire que la grippe? Faux

C’est la comparaison la plus souvent utilisée, et elle suscite encore l’adhésion: le 15 septembre dernier, un sondage Léger demandait: « croyez-vous que la COVID-19 est plus, autant ou moins dangereuse qu’une grippe saisonnière ? » Presque le quart des Canadiens ont répondu que la COVID était autant ou moins dangereuse que la grippe.

Si on compare uniquement le total des décès dus à la COVID et à la grippe saisonnière, c’était vrai pendant les premiers mois de la pandémie. Mais il y a longtemps que ça ne l’est plus. Par exemple, au début d’avril 2020, des voix sur les médias sociaux avaient pris la saison de grippe 2017-2018 aux États-Unis comme élément de comparaison pour minimiser la gravité de la COVID et alléguer que des mesures de confinement étaient par conséquent inutiles. À peine un mois plus tard, les 60 000 décès de cette saison de grippe étaient dépassés par la COVID.

Si on compare plutôt avec les décès des années de grippes les plus mortelles, la comparaison a également fait son temps. Selon l’OMS, entre 290 000 et 650 000 personnes décèdent annuellement de la grippe sur la planète, un chiffre qui a été dépassé par la COVID dès le mois de juillet.

La grippe H1N1 quant à elle, avait officiellement tué 18 000 personnes en 2009-2010. En extrapolant, un article dans la revue savante The Lancet parlait de 151 700 à 575 400 morts non confirmés pour le H1N1, ce qui serait tout de même moins élevé que la COVID.

Enfin, l’argument « moins pire que la grippe » est trompeur s’il se base uniquement sur le nombre des décès. En effet, plus les connaissances sur la COVID s’accumulent, et plus la liste des séquelles à court et à moyen terme s’allonge.

La COVID, moins pire que la malaria?

Les comparaisons entre la COVID et les plus graves maladies infectieuses ont souvent pris la forme de tableaux qui présentaient des chiffres inexacts, ou des comparaisons rapidement désuètes.

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Par exemple, comme le notaient en mai nos collègues de l’AFP, un tableau ayant circulé sur les réseaux sociaux au printemps et comparant les décès dans le monde du 1er janvier au 30 mars, indiquait que la malaria tuait « sept fois plus » que la COVID. En peu de temps, cette comparaison était périmée, de sorte que dans un autre tableau qui avait circulé quelques semaines plus tard et qui recensait cette fois les morts du 1er janvier au 1er mai, la malaria ne tuait « que » 1,4 fois plus que la COVID.

La raison du rétrécissement de cet écart: la COVID circulait désormais à travers le monde et augmentait de façon exponentielle, alors que la malaria restait, comme chaque année, cantonnée aux mêmes régions de la planète. Par ailleurs, la COVID est contagieuse (une personne contaminée peut en contaminer d’autres), mais pas la malaria.

En date du 20 octobre, c’était maintenant la COVID qui avait tué davantage, soit 1,4 fois plus que la malaria.

La COVID, moins pire que la tuberculose ?

Certains de ces tableaux comparaient aussi la COVID avec la tuberculose, qui continue de tuer environ 1,3 million de personnes annuellement — une maladie pour laquelle, à l’instar de la malaria, on a pourtant des traitements. En tant que maladie hautement contagieuse et à traitement obligatoire, elle se compare effectivement à la COVID. Mais cette dernière a franchi le seuil du million de morts après seulement neuf mois, et si la tendance se maintient, elle aura dépassé le 1,3 million de décès avant la fin de l’année.

Par ailleurs, le Détecteur de rumeurs recommande de toujours observer les périodes de compilation des décès que comparent ces tableaux. Plusieurs ont commis l’erreur de comparer des totaux annuels (soit le nombre total de gens tués par une maladie en un an) avec le total provisoire de la COVID après quelques mois.

La COVID, moins pire que le sida?

Les comparaisons avec le sida ont aussi été utilisées au printemps dans un effort pour tenter de démontrer qu’on s’inquiétait beaucoup trop de la COVID. Selon l’OMS, le sida a tué 690 000 personnes en 2019, un chiffre qui a finalement été dépassé par la COVID en juillet. Mais la comparaison comportait une autre faille: alors que les détracteurs de la COVID prétendent que son taux de mortalité est trop faible pour qu’on s’en inquiète (moins de 1%), il est pourtant beaucoup plus élevé que le taux de mortalité des gens porteurs du VIH, le virus responsable du sida —puisque la médecine offre, dans le cas du VIH, des traitements éprouvés.

La COVID, moins pire que le cancer et les maladies cardiaques?

Le cancer et les maladies cardiaques continuent quant à eux de dominer le classement des causes de mortalité dans le monde. Mais cette comparaison est trompeuse, puisque ces maladies ne sont pas contagieuses: les prendre en exemple pour critiquer la nécessité d’un confinement ou du port du masque n’a donc pas de sens. Sans compter que COVID et maladies cardiaques ne vivent pas des existences séparées: la COVID et ses séquelles pourraient contribuer à faire augmenter le nombre de problèmes cardiaques.

La COVID, moins pire que les accidents de la route?

Les comparaisons sont tout aussi fallacieuses avec les accidents de la route. Et pourtant, elles circulent depuis la fin janvier. Elon Musk, patron de Space X, a lui-même effectué cette comparaison dans un courriel envoyé à ses employés le 13 mars, utilisant un décompte des morts qui, de surcroît, était déjà dépassé.

Selon le site Worldometer, le nombre de personnes décédées dans un accident de la route en 2020 rivaliserait avec celui causé par la COVID (un peu plus d’un million chacun en octobre).

Mais outre que les accidents de la route ne sont pas des maladies infectieuses, ils sont une cause de décès qui reste constante année après année. En comparaison, la croissance du coronavirus se poursuit, et on sait que cette croissance peut être ralentie avec des mesures simples (laver ses mains, garder ses distances, etc.).

 

 

Photo: Geralt / Pixabay

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