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Les participants à des événements internationaux de course à pied de grande envergure  augmentent-ils leur empreinte carbone? Le Détecteur de rumeurs est parti à la chasse aux chiffres.


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L’origine de la rumeur

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La nouvelle n’est pas passée inaperçue dans la communauté des coureurs en sentiers. L’athlète britannique Andy Symonds a renoncé à représenter la Grande-Bretagne aux Championnats du monde de Trail, qui ont lieu en novembre en Thaïlande. La raison de cette impasse à un événement pour lequel il a pourtant été sélectionné: son empreinte carbone d’environ 6,3 tonnes équivalent dioxyde de carbone (CO2), qu’il juge trop élevée. « Je ne peux tout simplement pas justifier, surtout face à moi-même, l’ajout de 4 tonnes supplémentaires à mon [bilan] de 2022 », a-t-il déclaré.

Diagramme à l’appui, le coureur de 41 ans estime qu’un tiers (33 %) de son empreinte carbone cette année provient des déplacements, ce qui en fait la première source de ses émissions de gaz à effet de serre (GES), devant l’alimentation (23 %). « Les quelques courses que j’ai faites loin de chez moi ont contribué le plus à mes émissions personnelles, en particulier lorsqu’un vol a été nécessaire », constate celui qui « souhaite que la course à pied soit un levier de réduction des émissions de CO2 et non pas une source d’émissions supplémentaires. »

Les chiffres

Les quelques études qui se sont intéressées à cette question semblent confirmer l’analyse du coureur. En 2021, des chercheurs français ont par exemple calculé l’empreinte carbone d’un coureur type habitant Paris et souhaitant participer au Marathon de New York. Henri —c’est le nom de ce faux-vrai marathonien— court presque tous les jours dès le 1er janvier afin d’être prêt pour la compétition, qui a lieu en novembre. Cela implique notamment qu’il use quatre paires de chaussures, mange un peu plus que la normale et s’abonne à des magazines de course à pied. Il va aussi tester sa forme physique lors du Marathon de Paris, en avril.

En fin de compte, qu’Henri prenne cinq douches chaudes hebdomadaires additionnelles ou qu’il se rende au boulot à la course tous les matins, change peu de choses. L’analyse de cycle de vie indique que son vol d’avion aller-retour pour se rendre à New York plombe son bilan carbone annuel: à lui seul, ce vol transatlantique émet pour chaque passager 3,56 tonnes équivalent CO2, soit 83 % des 4,3 tonnes équivalent CO2 attribuables à sa pratique de la course à pied.

Ces conclusions ne s’appliquent pas seulement aux amateurs de course à pied. Une revue de littérature publiée en 2021 par une équipe canado-américaine s’était intéressée aux études consacrées au fil des années à l’empreinte carbone d’athlètes professionnels, universitaires ou amateurs. Leur conclusion: « plus un sportif a les moyens ou l’obligation de voyager, plus son empreinte carbone est forte. Par exemple, un joueur de football en Premier League anglaise a une empreinte carbone annuelle représentant 6 à 10 fois celle d’une famille anglaise ».

Ces célébrités du soccer ne sont toutefois pas près de revoir leur façon de fonctionner, à en juger par la récente sortie de l’entraîneur du club Paris Saint-Germain. En réponse à des questions sur le déplacement de son équipe en jet privé entre Nantes et Paris (environ 350 km), ce dernier a ironisé : « on est en train de voir si l’on ne peut pas se déplacer en char à voile. »

Chez les coureurs toutefois, l’option la plus « verte » serait de participer à des événements locaux et régionaux plutôt qu’internationaux, seule façon de réduire les émissions de GES attribuables aux déplacements. Au Québec, plusieurs fédérations sportives proposent d’ailleurs un calendrier d’événements certifiés écoresponsables. Ainsi, un des piliers de la certification ÉcoTQ de Triathlon Québec concerne les transports, avec des critères tels que « [d’]encourager le covoiturage, ainsi que les transports en commun et [la] mobilité douce. »

 

Photo: Marathon de Montréal, 2012 / Wikipedia Commons

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