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L’une des choses dites lors de la conférence de presse du 22 septembre à la Maison-Blanche concernait un médicament, la leucovorine, qui serait bientôt recommandé comme traitement contre l’autisme par l’agence américaine d’approbation des médicaments (la FDA). Depuis, la confusion règne: approuvée pour qui, quand, et sur la base de quelles données?

Il y a bel et bien eu des essais cliniques, résume la revue Nature, mais chaque fois auprès de petits groupes. L’une de ces études, par exemple, n’avait porté que sur 80 enfants autistes de 2 à 10 ans, la moitié ayant eu de la leucovorine, appelée aussi acide folinique, et l’autre moitié un placebo. Chez ceux qui ont reçu le médicament, lit-on dans l’étude parue en septembre 2024 dans l’European Journal of Pediatrics, on note une plus grande amélioration des « interactions sociales » et des « habiletés langagières » que chez ceux qui ont reçu le placebo. Mais ce type d’observation est par définition subjectif, et le groupe était trop petit pour que les résultats soient concluants, commentaient quelques mois plus tard, dans le même journal, deux experts en neurologie de l’enfance et en troubles de l’autisme. 

Ce type de résultat mitigé est normal pour de petites études médicales. Mais dans le contexte où il s’agit d’un médicament soudainement promu par le directeur de la FDA, Martin Makary, dans le cadre d’une conférence de presse à la Maison-Blanche, il pose la question du message confus qui est envoyé aux parents, ont protesté de nombreux experts ces derniers jours. L’efficacité de ce médicament contre l’autisme n’a pas été établie, rappelle par exemple l’Autism Science Foundation, les scientifiques n’ont aucune idée du dosage qu’il faudrait donner, ni s’il faudrait l’ingérer ou l’injecter. Et on ne sait pas grand-chose de sa nocivité chez les enfants. 

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Dans un communiqué publié lundi, la FDA a annoncé qu’elle prévoyait l’offrir à une minorité d’autistes. En temps normal, les études qui sont soumises à la FDA pour obtenir une approbation portent sur des centaines de personnes, voire des milliers. 

Citée dans la revue Nature, la psychologue Catherine Lord, de l’Université de Californie, déclarait dès le 23 septembre: « J’ai entendu ça de beaucoup de familles. Ce qu’elles disent le plus souvent: Qu’est-ce que c’est, [ce médicament], qu’est-ce qu’on fait? »

La raison pour laquelle des chercheurs ont investigué l’acide folinique —et que certains parents en ont demandé depuis des années— c’est que des gens diagnostiqués avec un faible niveau de folate, ou acide folique, à l’intérieur du fluide qui entoure le cerveau, présentent parfois des traits associés à l’autisme. Et l’acide folinique est la forme active de l’acide folique. 

Sauf que cette observation n’est pas une relation de cause à effet et certainement pas une certitude. La minorité d’autistes dont parle la FDA serait donc constituée de ces personnes qui ont ce faible niveau de folate. Tout dépendant de ce qu’on entend par un « faible niveau » de folate, cela pourrait représenter de 7 à 30% des autistes, commente dans Nature la directrice scientifique de l’Autism Science Foundation, Alycia Halladay. 

Dans tous les cas, si on parle du « spectre de l’autisme » et non de « l’autisme », c'est parce qu’il s’agit d’un trouble complexe, aux multiples facettes, et qu’il n’existe pas une cause unique. Autoriser la leucovorine sans preuve que ça fonctionne pourrait avoir un impact encore plus dommageable à long terme, commente dans MedPage Today l’expert en bioéthique Arthur Caplan. « Si vous voulez construire encore plus de méfiance, c’est une bonne façon de le faire. »

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