
Le fait que les femmes aient, en moyenne, une plus longue espérance de vie que les hommes, est-il lié à des facteurs propres à notre humanité —les jeunes hommes seraient plus nombreux à mourir dans des accidents— ou à nos chromosomes? Une recherche sur plus d’un millier d’espèces de mammifères et d’oiseaux suggère qu’il faudrait regarder du côté des chromosomes.
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La différence n’est pas banale: sur l’ensemble de la planète, l’espérance de vie moyenne des femmes est de 74 ans et celle des hommes, de 68 ans. Une équipe dirigée par Johanna Stärk, de l’Institut Max-Planck d’anthropologie de l’évolution, en Allemagne, a donc décidé d’aller voir ce qu’il en était chez nos plus proches cousins animaux.
Elle a réalisé ce qui est probablement l’étude la plus complète sur le sujet: analyser toutes les données sur l’espérance de vie dont on dispose chez 528 espèces de mammifères et 648 espèces d’oiseaux —autant ceux vivant en captivité que dans la nature. Et le résultat est à l’avantage des femelles chez les mammifères: dans les trois quarts des espèces, elles vivent 12 ou 13% plus longtemps, en moyenne, que les mâles. Chez les oiseaux, c’est le mâle qui, dans plus des deux tiers des espèces, vit en moyenne 5% plus longtemps. La recherche est parue dans la revue Science Advances.
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Cela suppose donc que les chromosomes X —ceux associés à la femelle— contiendraient un « avantage ». À moins que ce soit le fait de les avoir en double —le mâle est porteur d’un chromosome X et d’un chromosome Y. Une hypothèse courante en génétique veut que les femelles soient mieux protégées contre les mutations délétères dans les chromosomes sexuels, parce qu’elles possèdent en quelque sorte une « copie de sûreté ». Cette hypothèse est à présent renforcée par le fait que chez les oiseaux, ce sont les mâles qui ont les deux mêmes chromosomes, appelés Z, alors que les femelles ont deux chromosomes différents, Z et W.
Mais un autre facteur ressortant des statistiques est plus intrigant, écrivent les chercheurs. Chez les mammifères où il y a une forte compétition pour l’accouplement, l’espérance de vie des mâles est plus courte, encore plus souvent que chez les autres espèces.
Une explication possible: lorsqu’il y a une telle « compétition », le mâle qui l’emporte est celui que l’évolution a favorisé avec des traits génétiques comme une plus grande masse corporelle, ou de plus gros ornements: par exemple, les plumes ou les ramures. Or, de tels traits sont « coûteux », d’un point de vue biologique: cela veut dire que le métabolisme a dépensé beaucoup d’énergie pour les entretenir. Cela, en plus du fait que ces individus vont se retrouver plus souvent à devoir combattre d’autres mâles. Autrement dit, il resterait moins « d’énergie » pour leur propre survie à long terme.