Dans la définition officielle de l’OMS, « avoir éliminé la rougeole » signifie une absence de transmission en continu de la maladie pendant 12 mois ou plus. Autrement dit, il y a bel et bien eu, depuis 27 ans, des éclosions ici et là, mais elles étaient la plupart du temps lancées par un voyageur venu de l’étranger et finissaient par être contrôlées en quelques semaines. Alors que cette fois, on assiste dans les deux cas à des éclosions qui s’étirent depuis un an.

Ce n’était pas un scénario inévitable. Depuis les années 1960, le vaccin contre la rougeole est un traitement préventif dont l’efficacité n’est plus à démontrer. Mais c’était un scénario prévisible: depuis quelques années, le pourcentage de gens vaccinés contre la rougeole diminue lentement. Et même si, à l’échelle du Canada et des États-Unis, le taux de vaccination demeure encore élevé (90% au Canada), il est particulièrement faible dans certaines communautés —et c’est souvent chez elles que démarrent ces éclosions. L’Alberta, un des foyers des éclosions cette année, rapportait que dans certains districts, 30% des jeunes étaient vaccinés. 

Aux États-Unis, en date du 16 décembre, on approchait le seuil des 2000 cas cette année, selon le site du Centre de contrôle des maladies. Et ce chiffre est très certainement une sous-estimation, un grand nombre d’enfants contaminés n’ayant jamais été amenés à l’hôpital —parce que leurs parents se tiennent loin des médecins, ou parce que les symptômes étaient bénins. Trois personnes en sont décédées, dont deux enfants. 

Chez ces derniers, les cas graves qui ont conduit à des hospitalisations, semblent être systématiquement chez des enfants non vaccinés. 

Au Canada, il y a eu deux décès. En décembre, une nouvelle éclosion apparaissait au Québec et on signalait un premier cas à Montréal le 18 décembre, rapportait la Direction générale de la santé publique. 

La nomination aux États-Unis d’un ministre de la Santé antivaccins n’est pas à blâmer —pour l’instant. Le lent recul du taux de vaccination contre la rougeole avait commencé avant même la COVID, et les militants antivaccins ont trouvé dans la pandémie des prétextes pour jouer sur les peurs de certains parents et de certaines communautés. Mais en faisant la promotion d’idées fausses et en plaçant à des postes stratégiques des personnes qui défendent les mêmes idées que lui sur les vaccins, Robert F. Kennedy risque de donner du carburant aux parents inquiets ou victimes de désinformation, avec des impacts qui se feront sentir en 2026 et au-delà…