Je continue cette semaine la publication du « journal de bord » de mon livre en y publiant certains encadrés qui n’ont pu, faute d’espace, trouver leur place dans le bouquin. Celui-ci entretenant déjà des rapports étroits avec le site web Le cerveau à tous les niveaux et son blogue grâce à différents renvois, cette conversion ne fait donc qu’étendre une approche déjà présente depuis le début du projet. Je publie donc aujourd’hui un quatrième encadré ainsi retiré du chapitre 8. Il porte sur dichotomie fonctionnelle classique du système visuel où l’on considère une voie ventrale temporale associée à l’identification des objets et une voie dorsale pariétale plus impliquée dans les relations spatiales entre eux, cette dernière devient l’une des régions où peut avoir lieu la spécification d’actions potentielles et leur sélection subséquente pour effectuer un comportement.
Quand je parle du cortex visuel et pariétal, je fais référence à la dichotomie fonctionnelle classique dans le système visuel entre une voie dorsale et une voie ventrale. La voie dorsale, impliquant donc le cortex pariétal, serait une « voie de l’action » qui, en intégrant les relations spatiales entre l’organisme et les objets, comme leur emplacement ou leur taille, nous permettrait d’interagir efficacement avec eux. Alors que la voie ventrale serait plutôt impliquée dans la reconnaissance consciente de l’identité des objets avec leur forme, leur couleur, etc. Notre approche ne va pas nier que ce genre de représentations internes correspondant à certains aspects de notre environnement externe peuvent être utiles à un système de contrôle dynamique comme le cerveau. Mais ces représentations n’ont pas besoin d’être explicitement descriptives. Elles doivent simplement aider à déterminer si ça vaut le coup d’approcher tel ou tel objet. Et, si c’est le cas, de spécifier par exemple la séquence des transformations du système dynamique pour l’amener à saisir cet objet. D’où l’importance de les concevoir comme des représentations pragmatiques, le plus souvent implicites ou inconscientes, qui permettent de guider globalement nos interactions avec le monde.
Pour en revenir au système visuel, on a toujours considéré, au fond, que la voie dorsale générait des représentations pragmatiques implicites, sans les désigner comme telles. Et même pour la voie ventrale, on se rend compte que son activité n’encoderait pas nécessairement les caractéristiques globales des objets, mais détecterait simplement certains indices pour les identifier en fonction de leur utilité dans une situation donnée. Donc, un rôle pas tant dans la représentation des caractéristiques du monde que pour arbitrer entre différentes manières d’interagir avec lui. Et ce genre d’arbitrage se rapproche plus de la spécification de telle ou telle affordance, donc bien plus compatible avec des représentations pragmatiques que descriptives.