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À l’heure actuelle, toutes les hypothèses biologiques du trouble déficitaire de l'attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) ont été réfutées ou n’ont pas été confirmées.

Les Lignes directrices canadiennes sur le TDAH soulignent que jusqu’à 90 % de ceux et celles qui reçoivent ce diagnostic en décrochent au moins un autre, et environ la moitié reçoivent trois diagnostics différents. Les symptômes d’inattention, d’impulsivité et d’hyperactivité peuvent-ils mieux s’expliquer par la présence de ces autres problèmes que par une hypothétique maladie du cerveau ?

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En effet, il existe une foule de problèmes culturels, sociaux, écologiques et médicaux qui peuvent donner naissance aux symptômes qui sont au cœur du TDAH. Ces symptômes représentent la partie visible ; ils peuvent cacher les causes sous-jacentes de l’inattention et de l’hyperactivité.

Contrairement à l’opinion établie, un diagnostic de TDAH présente plusieurs défis. Les médecins qui soupçonnent l’existence d’un TDAH ou le diagnostiquent réfèrent des enfants au centre spécialisé de l’hôpital de Rivière-des-Prairies. Ce dernier retire 40 à 60 % de ces diagnostics, ce qui suggère un taux de surdiagnostic élevé. Est-il justifié de superposer un diagnostic de TDAH à l’enfant ayant reçu un diagnostic d’autisme, à celui qui souffre de retard mental, ou encore à celui qui présente un problème de dyslexie ou de dyscalculie ? Ces personnes souffrent-elles de deux, voire trois « maladies » différentes ? Ne sommes-nous pas devant un exemple de surmédicalisation ?

Des problèmes culturels

Parmi les problèmes culturels susceptibles d’entraîner un diagnostic de TDAH, comptons la différence d’âge des enfants qui font partie d’une même classe, un écart qui peut atteindre un an. Aux États-Unis et en Islande, les plus jeunes de leur classe sont respectivement 64 et 50 % plus susceptibles de recevoir le diagnostic que les plus âgés. En Colombie-Britannique, ce taux est de 70 % chez les filles et 30 % chez les garçons. Enfin, 60 % des enfants québécois sous psychostimulants sont nés en juillet, août et septembre avant la date limite d’admission à l’école. Les plus jeunes de leur groupe ont moins de maturité, ce qui peut très bien expliquer, pour un grand nombre d’entre eux, qu’ils soient plus inattentifs ou hyperactifs.

La fréquence du TDAH atteint un pic à l’adolescence. La poussée des hormones programme temporairement les adolescents à se coucher plus tard. Au matin, à cause du manque de sommeil, ils sont fatigués, parfois irritables et hyperactifs, car l’école commence trop tôt. Par ailleurs, les textos à 2 heures du matin ne prédisposent pas au sommeil et dormir avec son téléphone intelligent dérobe 20 minutes de sommeil par nuit.

Finalement, les enfants qui sont plus actifs que la moyenne ne sont pas à l’abri du diagnostic dans une société qui tolère mal la différence et qui ne supporte pas que les enfants soient bruyants. Au Québec, des voisins ont remis une mise en demeure aux parents de trois enfants parce que les cris de ces derniers les indisposaient ; en Angleterre, une école a carrément aboli la récréation parce que les voisins n’appréciaient pas les cris des enfants (Rima Elkouri, La Presse, 29 septembre 2015).

Des problèmes sociaux et écologiques

Plusieurs enfants et adolescents qui vivent des situations difficiles ou qui ont subi des traumatismes importants sont plus susceptibles d’être diagnostiqués TDAH. Des études ont montré que les filles victimes d’abus sexuels et les enfants de chômeurs chroniques sont respectivement sept et cinq fois plus à même de recevoir ce diagnostic. De même que ceux et celles dont les parents vivent une séparation difficile, dont un des parents a reçu un diagnostic de trouble mental ou a des démêlés avec la justice.

Des problèmes psychologiques

En plus d’un diagnostic de TDAH, un contingent important d’enfants reçoit un diagnostic de dépression, d’anxiété, de trouble des conduites, de trouble oppositionnel, de syndrome de Gilles de la Tourette, d’Asperger ou encore de retard mental. Les Lignes directrices canadiennes sur le TDAH estiment que jusqu’à 58 % des enfants diagnostiqués autistes répondent aux critères du TDAH. Quant aux adolescents, on estime que 25 à 75% de ceux qui ont été diagnostiqués TDAH pourraient également recevoir un diagnostic de trouble oppositionnel (ils défient l’autorité, sont colériques et rancuniers). Pour s’en tenir à ces exemples, un diagnostic d’autisme ou de retard mental ne suffit-il pas à se rendre compte des symptômes ?

Prenons le cas des enfants et des adolescents qui sont déprimés, révoltés, anxieux : sont-ils inattentifs, impulsifs ou hyperactifs à cause d’une maladie génétique et/ou neurologique ? Ou est-ce plutôt à cause de leur contexte social (pauvreté, familles dysfonctionnelles) ? Par ailleurs, les enfants chez qui on diagnostique un problème d’anxiété (un sur trois selon la CADDRA) ou de dépression sont susceptibles de se faire prescrire un antidépresseur. Or, il est reconnu que les antidépresseurs peuvent engendrer des symptômes d’agitation (akathisie dans le jargon médical) pouvant être confondus avec de l’hyperactivité.

Des problèmes médicaux

Les enfants et les adolescents qui souffrent de troubles de l’apprentissage, de troubles du sommeil, notamment d’apnée, de dysfonctionnement de la thyroïde, d’épilepsie, de traumatismes crâniens ou de problèmes d’audition sont susceptibles de recevoir de surcroît un diagnostic de TDAH. Souffrent-ils réellement de deux maladies différentes ?

Les personnes ayant des problèmes d’audition entendent, mais le message est mal analysé sur le plan émotionnel. Quand l’audition est altérée, la compréhension du message se fait au prix d’efforts gigantesques pouvant causer fatigue, irritabilité et difficultés de concentration et de contrôle des impulsions.

Conclusion

Les causes biologiques du TDAH restent inconnues. En l’absence de marqueur biologique, comment est-il possible de faire la différence entre un TDAH qui serait d’origine génétique ou neurologique, et ces autres difficultés qui donnent naissance aux symptômes qui sont au cœur du TDAH ? Ces symptômes peuvent camoufler les problèmes qui apparaissent en même temps que le TDAH et engendrer des traitements inappropriés.

En l’absence de marqueur biologique, le TDAH est identifié à partir de ses symptômes. Or, un symptôme n’est pas une maladie. Par exemple, la fièvre n’est pas une maladie, mais l’indicateur qu’un processus physiologique sous-jacent est en cause, que ce soit une grippe, un rhume, ou encore une malaria.

Le directeur de l’Institut de santé mentale des États-Unis, le docteur Thomas Insel, a disqualifié le DSM comme outil diagnostique, parce qu’il est fondé sur les symptômes. Les critères d’identification du TDAH sont subjectifs, fondés sur les observations du comportement ou des tests psychométriques. Ces observations et ces tests peuvent être interprétés de multiples manières. C’est ainsi qu’il existe des écarts énormes entre le jugement des parents et des enseignants quand il s’agit d’évaluer le comportement des enfants.

Au cours des dernières années, il s’est créé en matière de santé ce que le Journal de l’Association médicale canadienne qualifiait de bulle génétique, c’est-à-dire l’impression que tout est génétique. Le Centre de contrôle et de prévention des maladies des États-Unis a publié ce graphique (voir la Figure 1 en cliquant sur la photo) qui représente les principaux déterminants de la santé. Les gènes et la biologie, qui peuvent jouer un rôle clé au niveau individuel, causer des souffrances importantes et mettre fin à vos jours prématurément, occupent une place relativement minime en comparaison des facteurs sociaux et écologiques dans les déterminants de la santé des populations.

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