Contrairement aux ordinateurs classiques les plus puissants, l’ordinateur quantique utilise des bits quantiques, ou qubits, qui peuvent valoir 0 et 1. Lorsqu’il faut traiter un bit quantique, l’ordinateur le fait en 1 fois, pour son état à 0 et à 1 en même temps. Il traite donc les informations de façon fondamentalement différente d’un ordinateur classique. Les ordinateurs classiques les plus puissants, les supercalculateurs, ne suffisent pas toujours pour résoudre certains algorithmes puisque le temps de résolution du problème dépasserait l’espérance de vie de plusieurs générations. Dans la littérature, on aborde la question des ordinateurs quantiques pour résoudre des problèmes que les classiques ne peuvent pas résoudre dans un temps de résolution raisonnable à l’échelle humaine [1].
La taille de cet avantage, parfois hypothétique, évolue au fur et à mesure que la recherche avance. Selon Arute et al. (2019), un supercalculateur (Summit) mettrait 10 000 ans pour effectuer un calcul qui pendrait 200 secondes avec un ordinateur quantique de 53 qubits [2]. Quelques mois plus tard, IBM a annoncé que cela prendrait 2,5 jours pour un supercalculateur [3]. Quelques années plus tard, un article est paru affirmant que cela prendrait 15 heures [4]. D'autres auteurs ont fait un échantillonnage de bosons avec un ordinateur quantique (ordinateur photonique de Xanadu) d’un autre type que celui précédemment cité. Leur algorithme a mis 36 micro secondes, au lieu des 8 500 années possibles du supercalculateur japonais (Fugaku) [5]. Par ailleurs, cette bibliographie sur des comparaisons de temps de calcul entre un ordinateur quantique et un supercalculateur est assez limitée en nombre de cas d’étude.
L’argument d’un ordinateur par rapport à l’autre est le temps de calcul, et indirectement la consommation d’énergie (énergie [Wh] = puissance [W] * temps [h]). Comme les exemples précédents l’ont montré, le défi lié à la différence du temps de calculs entre le quantique et le classique est que les progrès des méthodes classiques peuvent aussi diminuer cet écart. La revue bibliographique de Scholten et al. (2024) présente des exemples de nouvelles méthodes classiques, d’expériences quantiques et de méthode d’inspiration quantique faites par l’informatique classique conduisant à une sorte de « compétition amicale entre les deux communautés » [6].
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Si vous êtes familiers avec l’analyse du cycle de vie (ACV), vous savez que la comparaison entre deux systèmes doit être la plus holistique possible. Choisir entre deux systèmes sur la seule base de la performance technologique (ex : temps de calcul) n’est pas suffisant lorsqu’il est question de considérer les impacts environnementaux. En plus de la consommation énergétique, l’industrie du numérique nécessite des matières premières précieuses pour la fabrication des composants électroniques, dont l’or et l’argent. Les équipements quantiques sont aussi en demande de ces ressources, notamment l’or pour sa bonne conductivité thermique. Il recouvre certaines plaques à l’intérieur du cryostat refroidissant la puce qui fait les calculs à -273 °C, à quelques millikelvins du zéro absolu.
En partenariat avec l’Institut Quantique de l’Université de Sherbrooke, le LIRIDE a mis en place un projet de comparaison des impacts environnementaux entre un ordinateur quantique et un supercalculateur. La revue bibliographique a montré des exemples d’ACV pour les équipements informatiques classiques mais pas pour les ordinateurs quantiques. Dans l’hypothèse d’une même durée de vie pour les deux ordinateurs, la comparaison se fera par rapport au même temps de traitement, pour plusieurs temps, comme présentée à la figure, et pour plusieurs indicateurs environnementaux.
La modélisation permettra de savoir s’il peut exister un moment à partir duquel un ordinateur devient plus impactant en fonction de la durée d’utilisation (entre h2 et h3 environ dans l’exemple fictif de la figure). Cela permettra aussi d’afficher la différence des impacts dans le cas où le temps de calcul est différent entre les deux types d’ordinateurs.
Par Sylvain Cordier, Stagiaire postdoctoral au LIRIDE (Université de Sherbrooke).