Son amour des fleurs et des voyages l'a notamment mené
en Chine, en Argentine, au Chili, en Afrique du Sud et en Inde, à la recherche de plantes qui pourraient se plaire dans nos plates-bandes nord-américaines. Il était récemment de passage à Montréal, pour disséminer sa passion aux amants de la flore au cours d'une conférence. Portrait.
Abonnez-vous à notre infolettre!
Pour ne rien rater de l'actualité scientifique et tout savoir sur nos efforts pour lutter contre les fausses nouvelles et la désinformation!
Diplômé en horticulture à Saint-Hyacinthe, Dave Demers a joué les guides-interprètes, exercé son pouce (vert) dans un jardin privé dans lÉtat de New York et occupé, pendant trois ans, le poste dhorticulteur en chef au Domaine Joly de Lotbinière. Puis un jour, il déniche un livre où lon décrit les trouvailles horticoles les plus étonnantes dun chasseur de plantes globe-trotter : The Explorer's Garden de Daniel J. Hinkley: " cest le livre sur lequel jai vraiment accroché. En regardant la photo de lauteur posant devant lHimalaya, je me suis dit : ça a lair le fun ça! " raconte-t-il, lil brillant.
Aventures horticoles
Voyageant tantôt à ses frais, tantôt grâce à des commanditaires qui reçoivent en échange une partie des semences récoltées, il explore par exemple lAfrique du Sud où il découvre des familles de plantes dont il na jamais entendu parler auparavant. " Je réalisais quil y avait énormément plus despèces que sur les tablettes de centres jardins! " En escaladant les montagnes Drakensberg, il
découvre un massif dEucomis (ou lys ananas) qui pousse à flanc de montagne parmi les herbes (photo). " Voir ces plantes sauvages, spectaculaires pousser naturellement comme des pissenlits, cétait tellement improbable. Jen sautais sur place! "
Un périple en Chine où lon retrouve 20% de la flore mondiale le met en présence dune biodiversité extraordinaire. " En me tenant pendant une heure devant mon hôtel dans un petit village du Nord-Est du Sichuan, jai recensé plus despèces que pendant trois mois en Mongolie! " sémerveille-t-il. Ces steppes mongoles, il les arpente au cours dune mission que lui confie lInstitut québécois de développement en horticulture ornementale, financé par lACDI. " Je regardais les fleurs et je décidais sil valait la peine de revenir récolter les semences pour éventuellement les mettre en culture au Québec. "
En Asie, il voit entre autres, des Aconitum qui poussent en plein champ ou dans des boisés. " Ces plantes de climat tempéré seraient bien rustiques au Québec, en plus dy être déjà bien appréciées " commente-t-il. Désirant lancer sa propre collection, le prospecteur de plantes se met donc au travail. Il souhaite en faire des hybrides afin de les rendre plus faciles à cultiver tout en augmentant leur valeur ornementale.
Car si certaines plantes sont intéressantes à létat sauvage, dautres ont besoin dun petit coup de pouce. " On en sème pendant plusieurs années et sur les 10 000 qui vont lever, on en sélectionnera une qui fait des fleurs plus grosses ou qui fleurit plus longtemps. Ensuite, on peut lhybrider en prenant un peu de pollen sur une plante et en le posant sur une autre. "
Voir les espèces pures en milieu naturel le renseigne également sur les variations qui ont mené à la plante qui croît dans notre jardin. Il donne pour exemple le Caryopteris, un petit arbuste aux fleurs bleues dont lhybride nest pas très adapté au Québec. Or, une espèce cousine pousse en Mongolie où le climat continental extrême rend la vie dure aux plantes. M. Demers croit que " si on prenait ce Caryopteris et quon ajoutait un peu de son bagage génétique dans les hybrides quon a déjà, on pourrait faire des hybrides plus résistants à nos hivers ".
Lorsquune plante a retenu son attention, il en récolte de petites quantités de semences quil utilise comme échantillons pour se bâtir un inventaire. " Limpact écologique de notre cueillette est minimal, prévient-il. Un moineau ferait plus de dégâts! " Si les plants eux-mêmes sont rarement prélevés cest parce que les graines sont faciles à nettoyer et inspecter. Ainsi, à la fin de la journée, la chambre dhôtel devient encombrée de semences mises à sécher après avoir été brossées (ou même rincées), dans des filtres à café. Sans cela, ces précieux germes de vie ne pourraient obtenir leur certificat phytosanitaire nécessaire à leur passage dans " la moulinette administrative " de limportation.
Selon les voyages, ces graines iront enrichir la collection botanique de commanditaires : (souvent des collectionneurs ou des propriétaires de jardins privés) ou permettront au jardinier aventurier de faire pousser sa propre entreprise : une pépinière dans le sud de la Colombie-Britannique. " Transplanté " lan dernier à Vancouver, il y fait également des aménagements et de la consultation en plus de collaborer à Québec Vert et Côté jardin, des revues horticoles. Mais lexplorateur a la bougeotte et se sent un peu nerveux : " je nai pas encore de destination pour lautomne ". Quelquun veut-il passer sa commande ?