PARISC’est le plus gros projet scientifique du monde. Mais il aura besoin de... 35 ans. Et pour l’instant, la politique y prend autant, sinon plus, de place que la science.

Totalement méconnu de l’autre côté de l’Atlantique, ITER (International Thermonuclear Experimental Reactor) est pourtant, sur papier, le Grand Graal. Imaginez : un réacteur nucléaire qui produirait une énergie illimitée... et sans déchets! Ce serait, si ça marche, la même énergie qui fait briller le Soleil sans interruption... depuis 5 milliards d’années!

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Il a fallu des années de débats politiques et de compromis pour s’entendre sur le site de construction de ce futur réacteur expérimental —Cadarache, dans le Sud de la France. Le Canada était en lice, mais s’est retiré du projet en 2003 —une décision dont il se mordra les pouces, si le rêve d’une énergie illimitée se concrétise un jour.

« C’est beaucoup plus réalisable que ça l’a déjà été », affirme le Britannique Glen Counsell, un des membres du comité directeur du consortium international. Il rappelle qu’en fait, cette énergie du Soleil, les physiciens la maîtrisent déjà —à une toute petite échelle. On appelle ça la fusion nucléaire; elle est, depuis les années 1950, derrière le réacteur russe Tokamak... et derrière la bombe à hydrogène. Il faut toutefois déployer une énergie considérable... et signer des factures tout aussi considérables. En comparaison, la fission nucléaire, elle, est beaucoup plus « facile » : c’est elle qui fait fonctionner les centrales nucléaires à travers le monde... mais produit des déchets qui demeureront radioactifs pendant des millénaires.

D’où la question-clef : peut-on rentabiliser l’énergie du Soleil? C’est là qu’intervient ITER : son objectif est de tester les technologies nécessaires, notamment des matériaux qui devront résister à des températures se mesurant en milliards de degrés, dans un édifice « grand comme deux cathédrales ». « C’est ça qui devrait nous porter pendant 35 ans », déclare le Français Didier Gambier, directeur du développement au même consortium.

Gambier et Counsel étaient, pour une rare fois, à l’avant-scène, lors du Salon européen de la recherche et de l’innovation, qui avait lieu à Paris au début du mois. ITER fait en effet peu parler de lui: c’est un projet qui n’a rien de bien médiatique, qui ne promet pas de résultats avant longtemps et qui, bien qu'en charge par l’Union européenne, n’a rien de réjouissant pour « vendre » l’Europe à ses citoyens sceptiques.

Assistait à cette conférence un auditoire spécialisé et attentif : d’où les questions pointues venues de la salle. « Rentable, d’accord, mais par rapport à quoi? » Qu’adviendra-t-il des recherches sur le Tokamak et autres engins du genre? Et surtout : quand saura-t-on si le rêve ne sera pas repoussé de 35 ans en 35 ans?

Sept à huit milliards de dollars pour construire la machine (sur 10 ans), et autant pour l’exploiter : et encore, ça, ce sont les estimations qui remontent à 2001... L'énergie gratuite a intérêt à se rentabiliser...

Pascal Lapointe

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