Peut-être n’avez-vous pas entendu parler de la Global Climate Coalition. Mais si vous êtes familier avec l’idée que le réchauffement climatique est un canular, ou que l’humain n’a aucun impact sur le climat, c’est en partie de cette coalition que ça vous est venu. C’est un groupe qui s’est attaqué pendant une décennie au « mythe » du changement climatique. Or, des documents démontrent que ce groupe a censuré... ses propres scientifiques!

 

Groupe de lobbying, mais que ses partisans préfèrent présenter comme un groupe de réflexion composé de scientifiques « sérieux », la Global Climate Coalition (GCC) s’est donnée pour mission, dans les années 1990, de « mieux faire comprendre » les changements climatiques, et de convaincre l’opinion publique qu’il existe un débat dans la communauté scientifique sur la réalité —ou non— du réchauffement planétaire.

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Or, des documents déposés dans le cadre d’une poursuite en justice, et dont le New York Times a obtenu copie, révèlent que les propres scientifiques de la GCC avaient conclu que le rôle des gaz à effet de serre dans le réchauffement climatique ne pouvait pas être nié.

« Les bases scientifiques de l’effet de serre et l’impact potentiel sur le climat des émissions humaines de gaz à effet de serre, comme le CO2, sont clairement établis et ne peuvent pas être niés. » Et vlan. C’était dans un rapport d’experts rédigé pour la Coalition, en 1995.

Ce rapport, bien sûr, n’a jamais été publié.

La coalition, est-il besoin de le rappeler, était financée —jusqu’à sa dissolution, en 2002— par l’industrie pétrolière, celle du charbon et celle de l’automobile. Certains de ses membres, comme l’Institut américain du pétrole, poursuivent toujours la lutte. D’autres, comme Exxon Mobil, ont fini par admettre que l’humain est largement responsable du réchauffement.

Dans l’article paru la semaine dernière à la Une du New York Times, le journaliste Andrew Revkin écrit que dans les années 1990, la GCC a dépensé des millions de dollars en campagnes publicitaires pour critiquer l’utilité d’un éventuel accord international (le Protocole de Kyoto allait être signé en 1997).

Les environnementalistes ne sont pas surpris par cette nouvelle révélation : il y a longtemps qu’ils comparent cette stratégie à celle du lobby du tabac qui, pendant des décennies, avait argué qu’il subsistait un « doute » dans la communauté scientifique sur le lien entre tabac et cancer. Plus récemment, grâce aux tonnes de documents déposés en cour dans le cadre des poursuites contre les compagnies de tabac, des auteurs comme le Britannique George Monbiot et l’Américain David Michaels (Doubt is Our Product) ont même pu établir des liens entre firmes de relations publiques et de lobby qui avaient travaillé jadis pour le tabac et qui ont ensuite travaillé pour les pétrolières.

Non, les environnementalistes ne sont pas surpris, mais ils sont déprimés, écrit George Monbiot cette semaine : ça veut dire que depuis 1995, les médias ont été un bar ouvert pour ces « experts » de la dénégation, qui ont pu abondamment avancer leur opinion « sans jamais se faire demander de dévoiler leurs sources ».

Le rapport de 1995 obtenu par le New York Times, est le résultat d’une poursuite déclenchée en 2007 contre l’État de Californie par l’Association des manufacturiers automobiles internationaux; ceux-ci contestent la constitutionnalité d’une réglementation californienne visant à limiter les gaz à effet de serre des véhicules.

En 1995, l’année de ce rapport de la GCC que la GCC avait jugé défavorable à ses propres vues, le Groupe des Nations Unies sur les changements climatiques avait de son côté conclu pour la première fois à l'existence d'un lien irréfutable entre la pollution humaine et le climat.

La GCC et ses alliés avaient férocement attaqué cette conclusion.

 

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