De la crise des tulipes en Hollande en 1637 à la présente crise financière, en passant par le krach de 1929, les bulles spéculatives, ces mouvements d’exubérance irrationnelle des investisseurs, mettent à mal les économies. Jusqu’à maintenant, leur comportement avait résisté à l’analyse. Mais, voilà qu’une équipe d’éconophysiciens, dirigée par Didier Sornette de l’École de technologie supérieure de Zurich, s’y est intéressée en prédisant… leur éclatement!

Les bulles spéculatives sont définies par les économistes comme une situation où les prix sont largement surévalués par rapport à leur valeur réelle. Les investisseurs emportés par l’enthousiasme des marchés se mettent à croire à une croissance sans limites. Une telle euphorie ne peut durer indéfiniment et tôt où tard, la réalité reprend le dessus sur la fiction et la bulle éclate. Dans le cas des éconophysiciens, la définition est purement mathématique : « Selon notre définition, une bulle spéculative se démarque par une croissance superexponentielle des prix, c’est-à-dire plus rapide que la croissance exponentielle normale », affirme Didier Sornette.

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Alors que les économistes étudient les causes de l’éclatement de ces bulles, les éconophysiciens s’intéressent plutôt à la mesure de la fragilité du marché qui provoque leur éclatement. Pour ce faire, les chercheurs étudient les oscillations par rapport à leur courbe de croissance superexponentielle; ces dernières se rapprochant de plus en plus avant le krach. « Comme avant la formation d’une fracture dans un matériel, il y a un raidissement que l’on peut détecter. »

Ainsi, grâce à cette méthode, ils ont pu annoncer le 10 juillet dernier que l’indice de la bourse de Shanghai s’effondrerait entre le 17 et le 27 juillet avec une probabilité de 80 %, et avec une quasi-certitude avant le 10 août. Et, comme prévu, le 4 août, l’indice de Shanghai commença à tomber et le 18 août, il avait chuté de 20 %.

Pouvoir prédire les bulles est un couteau à double tranchant. En effet, si cette technique devient d’usage courant, il est possible que la dynamique des marchés en soit affectée et que les prédictions ne soient plus valides. Et les chercheurs sont-ils tentés de mettre cette connaissance à profit? À cette question, Didier Sornette offre cette réponse sibylline : « Je ne joue pas en Bourse! Pas le temps. J'investis! »

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