Il s’agissait d’un geste d’éclat visant à dénoncer l’existence de ce marché lucratif de revues « prédatrices », c’est-à-dire ces revues qui n’ont de scientifique que le nom, et qui publient tout ce qu’on leur envoie... pourvu qu’on les paie. Anna O. Szust, de l’Université Adam Mickiewicz en Pologne — de son vrai nom, Katarzyna Pisanski, de l’Université de Sussex en Angleterre — a donc offert ses services aux éditeurs de 360 revues, dont un tiers avaient déjà été identifiées comme suspectes (les revues dites « prédatrices ») par ceux qui traquent ce phénomène. Le fait que les articles scientifiques de « Anna » n’aient jamais été recensés dans les répertoires établis, n’a pas semblé mettre la puce à l’oreille de 40 représentants des revues « prédatrices » (une sur trois), qui ont répondu favorablement à son offre. Quatre étaient même prêts à l’embaucher immédiatement comme rédactrice en chef !
À leur défense, la majorité des revues, qu’elles soient « prédatrices », en libre accès ou reconnues pour leur facteur d’impact, n’ont pas répondu ou ont rejeté l’offre. En tout, ce sont plus d’une centaine de revues réparties dans les deux dernières catégories qui ont rejeté la candidature, précisent les auteurs du canular — qui racontent toute l’histoire dans la dernière édition de Nature. Les rejets allaient d’une réponse « sans courtoisie » à une explication condescendante de la démarche à suivre pour devenir éditrice d’une revue scientifique (commencez par publier, et on en reparlera).
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Comme l’explique Pisanski en entrevue, cette « expérience » est aussi un « appel à l’action » pour les universitaires et les organismes subventionnaires, afin qu’ils cessent de ne valoriser le travail du scientifique que sur la seule base du nombre de publications : c’est cette pression à publier à tout prix qui finance l’existence même de cet écosystème de revues inutiles.