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Même dans un pays riche, les canicules tuent plus que les événements météorologiques extrêmes. Pourquoi cela, à l’ère des climatiseurs?

Aux États-Unis, une moyenne de 1300 personnes meurent chaque année des suites d’une chaleur extrême, selon l’Agence de protection de l’environnement. C’est davantage que le nombre de personnes tuées par des inondations ou des ouragans: ces derniers, en comparaison, ont tué en moyenne 46 Américains par année au cours des 30 dernières années.

Les deux derniers étés ont vu de nouveaux records être atteints dans différents coins d’Amérique du nord, depuis la Vallée de la mort en Californie avec ses 53 degrés le 1er septembre 2022 jusqu’à Lytton, Colombie-Britannique avec ses 49,6 degrés Celsius le 29 juin 2021 —la veille de la destruction de cette petite ville par un feu de forêt.

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Cette semaine, de nouveaux records locaux sont battus au Texas et en Louisiane, avec des températures dépassant les 45 degrés.

Or, si les canicules sont mortelles, c’est parce qu’il y a des limites de résistance au corps humain.

Comme quiconque a déjà pris sa température le sait, notre corps fonctionne à son meilleur à 37 degrés. Lorsque la température se met à grimper, le sang s’épaissit et le coeur doit pomper plus fort. Le corps a certes des mécanismes pour se débarrasser de la chaleur excessive —c’est le rôle de la sueur— mais ces mécanismes ne suffisent plus à la tâche lorsque l’humidité est élevée et que notre sueur ne peut plus s’évaporer. C’est dans ces circonstances que se produisent les épuisements par la chaleur, caractérisés par des crampes, des étourdissements et des nausées, et les coups de chaleur, qui peuvent entraîner des pertes de conscience, voire être mortels.

Le seuil de tolérance n’est pas le même d’une personne à l’autre et n’est pas non plus le même d’une région du monde à l’autre: le corps de ceux qui vivent dans un climat plus chaud peut devenir plus efficace en terme de transpiration. Mais même eux ont leurs limites: la canicule qui frappe actuellement en Inde a fait au moins 150 morts en quelques jours, et les hôpitaux de l’État d’Uttar Pradesh sont débordés.

Et c‘est la raison pour laquelle des canicules dans des régions d’Amérique du nord ou d’Europe qui y sont moins habituées, provoquent autant de décès, spécialement chez les personnes âgées, les enfants et les gens qui souffrent de problèmes cardiaques ou respiratoires.

C’est en plus de certaines classes de travailleurs: en agriculture et dans la construction, qui n’ont pas le choix d’être à l’extérieur. « Plusieurs travailleurs  sont payés à l’heure et ont le sentiment qu’ils ne peuvent pas se permettre de prendre une journée de congé à cause de la météo », écrivait en 2021 la journaliste Tanya Lewis, dans le Scientific American.

On aurait tort de croire que les systèmes modernes de climatisation sont accessibles à tous. À l’occasion d’une canicule qui avait frappé le nord-ouest du continent en juin 2021, le New York Times rapportait que, dans certains de ces comtés, les deux tiers des familles dont les revenus étaient de moins de 50 000$ par an, n’avaient pas de climatiseurs, et 70% des maisons louées. Qui plus est, de telles régions sont moins habituées à de telles chaleurs, avec pour résultat que les autorités locales de la santé y sont mal préparées. Le scénario du pire étant celui où la demande excessive en électricité, à cause des climatiseurs, provoque des pannes, comme cela s’est vu en Inde cette semaine.

Si, à long terme, la lutte au réchauffement climatique devient une urgence pour limiter la multiplication de ces événements, à court terme, il existe des mesures qui peuvent être prises pour atténuer les effets. En ville, tout nouvel espace vert réduit un peu la chaleur dans un quartier, au contraire des rues et des stationnements, qui absorbent et retiennent la chaleur. Des arbres procurent de l’ombre, en plus d’émettre de l’humidité. Et tout lieu climatisé que peut ouvrir une ville au bénéfice de ces citoyens plus vulnérables, se doit d’être accessible à ceux qui n’ont pas de voiture. Dans un rapport publié ce mois-ci par le ministère de la Santé de l’État de Washington, deux ans après une canicule dévastatrice, les auteurs y vont de ces recommandations à l’intention des municipalités, des responsables des parcs et des organismes communautaires, les invitant à réfléchir aux façons dont, à leur échelle, ils peuvent réduire les risques. Dans cet État, en 2021, la canicule avait fait près de 450 morts en une semaine.

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