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Au début de la semaine, le vulgarisateur Olivier Bernard, alias Le Pharmachien, jetait l’éponge devant une avalanche de messages entremêlant menaces et intimidations en relation avec son texte critique des injections massives de vitamine C chez des patients subissant une chimiothérapie.
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Le Détecteur de rumeurs ne refera pas le travail de vérification des faits que ses collègues ont déjà accompli. Il vous propose plutôt l’exercice suivant : isoler, d’un côté, les arguments qui sont vérifiables — que ceux-ci s’avèrent vrais ou faux — et de l’autre côté, les opinions — qui, par définition, ne sont pas vérifiables.
L’astuce du Détecteur de rumeurs : cet exercice pourrait s’appliquer à n’importe quel autre débat dans lequel vous vous retrouverez entraîné dans le futur. Séparer les faits des opinions permet généralement de découvrir qu’il existe bel et bien des éléments d’informations sur lesquels il existe un consensus — et c’est à partir d’un consensus qu’on peut commencer à construire une discussion plus solide. Autrement dit, on peut être « pour » ou « contre » quelque chose, tout en admettant que certains des faits avancés par « l’autre camp » sont incontournables.
Toutes les affirmations qui suivent proviennent de commentaires publiés en réaction aux articles du Pharmachien ou du journaliste Jean-François Cliche, ou en appui à la pétition qui demande au gouvernement du Québec de « documenter les données » sur l’efficacité des injections de vitamine C et d’autoriser les médecins « à prescrire la vitamine C en complément de traitement ».
Les affirmations qui peuvent être vérifiées
- « Ces injections massives de vitamine C sont illégales au Québec » : Faux. Les cliniques qui en offrent ne s’exposent à aucune poursuite.
- « Ces injections ne sont pas disponibles au Québec » : Faux. À la suite de la première pétition en 2018, une clinique des Laurentides a offert à l’auteure de la pétition de lui donner ces injections.
- « Ces injections sont davantage disponibles en Ontario qu’au Québec » : Affirmation à vérifier. Pour l’instant, une seule clinique ontarienne a été identifiée. Elle est située à Ottawa.
- « Les médecins québécois n’ont pas le droit de prescrire ces injections » : Faux. L’Association des médecins hématologues et oncologues du Québec ne recommande pas à ses membres de le faire, considérant cette pratique non éthique. Cependant, elle n’est pas proscrite par la loi.
- « Ces injections sont remboursées par l’assurance-maladie en Ontario » : Faux. (détails ici)
- « Ces injections massives de vitamine C traitent le cancer » : Faux, et ce n’est pas non plus ce que prétend la pétition qui a déclenché ce débat. Ce qui y est plutôt suggéré, c’est d’avoir accès à ces injections pour réduire les effets secondaires de la chimiothérapie, donc améliorer la qualité de vie des patients.
- « Ces injections améliorent la qualité de vie des patients » : Incertain. Les études les plus souvent citées, comme cette méta-analyse, sont sans groupe contrôle, c’est-à-dire qu’elles n’ont pas comparé leurs résultats avec ceux de patients ayant reçu un placebo. En recherche, c’est là une exigence minimale pour pouvoir valider l’efficacité d’un traitement.
- « Ces injections ne causent pas d’effets secondaires » : Incertain. Les études ont noté « très peu » d’effets secondaires récurrents. C’est ce que note aussi l’Institut américain du cancer. Il ajoute toutefois qu’elles peuvent être dangereuses pour certains patients, dont ceux souffrant de problèmes rénaux.
- « Ces injections sont sans risque » : Encore plus incertain, vu la maigreur des études. Certains de ces chercheurs évoquent un risque que ces injections massives de vitamine C nuisent à l’efficacité des médicaments anticancer ou de la chimiothérapie.
- « La vitamine C traite beaucoup de maladies » : Faux. C’est une vieille idée reçue, popularisée entre autres par le Prix Nobel Linus Pauling. Même la croyance à l’effet que la vitamine C guérirait le rhume est fausse.
- « Le Pharmachien ne critique jamais l’industrie pharmaceutique » : Faux.
Les opinions qui ne peuvent pas être vérifiées
En comparaison, les affirmations qui suivent sont des opinions. Bien qu’il soit possible à une opinion de s’appuyer sur des affirmations qui, elles, pourront être ensuite vérifiées, les opinions qui suivent n’entrent pas dans cette catégorie.
- « Ces injections devraient être remboursées par l’assurance-maladie »
- « Les médecins devraient être encouragés à en prescrire » : Ces deux affirmations sont des prises de position. Pour qu’on puisse savoir si elles s’appuient sur des faits, il faudrait qu’elles soient complétées par une explication — dire pourquoi ces injections devraient être remboursées plutôt que d’autres traitements, et sur la base de quels critères.
- « Il faut créer un Registre de la vitamine C par injection » : Ici aussi, ça dépend. La pétition dit qu’un tel Registre « permettrait de documenter les données » sur les tests d’injections de vitamine C, l’efficacité de ces tests et leurs effets secondaires. Si de telles études sont bel et bien menées sur des patients, le Registre peut effectivement avoir son utilité — en obligeant ceux qui les font à davantage de transparence, comme cela se fait déjà dans les études en pharmacologie et en médecine. Mais si son seul but est de recueillir des témoignages, le Registre ne suffira pas à démontrer l’utilité d’un traitement.
- « Le Québec n’est pas assez ouvert d’esprit »
- « Les médecins sont trop frileux »
- « La science est trop frileuse »
- « La science n’est pas infaillible »
- « La science ne connaît pas tout » : Aucune de ces cinq opinions, lues sur différentes tribunes depuis le début de la semaine, n’offre de prise pour une vérification des faits, et elles n’offrent non plus rien qui permette un commencement de débat sur les mérites de la vitamine C.