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Depuis l’Accord de Paris de 2015, tout le monde semblait s’entendre sur la notion de réduction des gaz à effet de serre. Cette année à la COP28, ceux qui n’étaient pas familiers avec le jargon ont appris que ça ne voulait pas dire la même chose que « réduction des énergies fossiles ». Le Détecteur de rumeurs passe en revue 5 des concepts-clefs de la nouvelle entente intervenue au terme de cette rencontre annuelle sur le climat.

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1- Énergies fossiles, finalement

Il aura fallu du temps: c’est la première fois en 28 rencontres des Nations unies sur les changements climatiques que ces énergies sont à ce point sur la sellette. Ce qui en dit long sur les détours langagiers à employer pour satisfaire près de 200 pays aux intérêts économiques divergents. Quelques jours avant la fin de la COP28, les deux tiers de ces pays étaient apparemment d’accord avec la phrase « sortie des énergies fossiles » (127, au dernier décompte). Les opposants, dont les pays de l’OPEP au premier rang, l’ont emporté: on n’utilisera pas le mot « sortie » (phase out). Le texte final emploie plutôt les mots réduction et transition.

2- Réduction de quoi? 

À l’article 28, on « reconnaît le besoin d’une réduction rapide, profonde et soutenue  des émissions de gaz à effet de serre ». À noter qu’on lit bien réduction des gaz à effet de serre, et non des combustibles fossiles. Dans le même paragraphe, on lit ensuite que, pour réussir cette réduction, les parties sont « appelées » à contribuer aux « efforts suivants »: suit alors une liste de huit de ces efforts, dont le 4e est celui dont tout le monde parle, « transition ».

3- Transition, une longue liste

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Ici, c’est bien d’une transition « hors des énergies fossiles » dont on parle, et c’est cette formulation qui constitue une première dans l’histoire des COP. Une transition « d’une manière juste, ordonnée et équitable, en accélérant l’action pendant cette décennie critique, de manière à atteindre la carboneutralité en 2050, en accord avec la science ».

Mais on sent ici aussi la pression des États pétroliers. Les mots « pétrole » et « gaz » n’apparaissent nulle part dans le document, seule la réduction de l’utilisation du charbon est mentionnée dans la liste des « efforts » de l’article 28 (c’était déjà dit lors de la COP de 2021). 

On trouve aussi à l’article suivant (29) une neuvième proposition d’effort: « reconnaître » les « carburants de transition essentiels », ce qui est vu comme une allusion au gaz naturel, qui est un combustible fossile. 

On note également, dans la liste, les technologies de captage et stockage du carbone —dont l’efficacité reste à prouver— tout comme on appelle les pays à « tripler les capacités des énergies renouvelables mondialement » d’ici 2030. 

Le point commun derrière tous ces exemples est qu’on laisse le choix aux pays de choisir les « efforts » qu’ils jugent les plus appropriés, en « prenant en compte » leurs propres « approches » et leurs réalités économiques (une formulation qui vaut autant pour les États pétroliers moins pressés de faire la transition que pour les pays plus vulnérables qui n’ont pas les moyens de la faire rapidement). C’est aussi la raison d’être du verbe « appeler ». 

4- Un appel, pas une contrainte

Dans la version précédente du texte, le verbe « pourrait » avait choqué: aux yeux des critiques, il laissait trop le champ libre aux pays d’agir ou non face aux combustibles fossiles. Mais simplement les « appeler » (en anglais, calls on) à « contribuer aux efforts globaux » leur laisse tout de même une très grande marge de manoeuvre, vu la taille de la liste. Selon le décodage qu’en fait l’éditeur du magazine Carbon Brief, Leo Hickman, « dans le jargon légal » de ces négociations, « c’est le terme le plus faible utilisé pour de telles exhortations ».

Les différents pays retournent chez eux avec une « invitation » à une transition en théorie plus rapide que celle qu’ils ont entreprise, sachant qu’un grand nombre d’entre eux ne sont pas sur la voie d’atteindre en 2030 les cibles de réduction des gaz à effet de serre qu’ils avaient mises sur la table en signant l’Accord de Paris en 2015. 

5 - Quel financement pour les pays les plus vulnérables?

À la surprise générale, le nouveau fonds sur les « pertes et préjudices » (c’est-à-dire le financement pour réparer les dommages subis par les pays plus pauvres à cause des changements climatiques) a été adopté dès la première journée de la COP28. Mais il reste à décider des modalités. Et le document final de la COP28, s’il reconnaît que le niveau actuel de financement accordé par les pays plus riches est déficient, ne s’avance pas dans cette direction.

La déléguée de la Bolivie a résumé les impressions de plusieurs de ses homologues lors de la séance de clôture, le 13 décembre: nous soutenons le document final, « mais nous voulons souligner nos réserves sur les responsabilités communes et différenciées » —une formulation qui, dans les négociations climatiques, réfère au fait que les pays en voie de développement ne devraient pas se faire imposer les mêmes obligations de réduction des gaz à effet de serre, à moins de recevoir un financement conséquent.

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