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Les douleurs musculaires et tendineuses touchent chaque année un grand nombre de personnes sportives au Québec. La quantification et le suivi de la charge d’entraînement constituent une approche facilement applicable, qui permettrait de réduire l’apparition de ces blessures.

Alice est subitement empreinte d’une motivation débordante après les résolutions du Nouvel An. Animée par la volonté de devenir plus active cette année, elle se fixe comme objectif de reprendre la course à pied en vue de participer au 10 km de Montréal en septembre prochain. Chaque matin, elle enfile ses chaussures, sans prendre de jour de repos. Au bout d’une semaine, elle ressent une douleur intense au genou, au point où elle ne peut plus courir. Son médecin diagnostique une tendinite, un trouble musculosquelettique *.

Au Québec, plus d’un million de personnes se blessent chaque année en pratiquant une activité récréative ou sportive [i]. Afin de réduire l’apparition des blessures, plusieurs équipes de recherche à travers le monde se tournent aujourd’hui vers la quantification de la charge d’entraînement [ii]. Cette approche a initialement été développée à la fin des années 1990 par Carl Foster, un éminent chercheur en physiologie de l’activité physique de l’Université du Wisconsin à La Crosse, aux États-Unis [iii].
 

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La charge d’entraînement

La charge d’entraînement permet de quantifier le stress mécanique auquel est soumis le corps pendant la pratique d’une activité physique, c’est-à-dire la somme totale des chocs ou microtraumatismes appliqués à l’ensemble du système musculosquelettique lorsqu’une personne effectue un mouvement ou une action. Par exemple, quand Alice court, ses genoux subissent des chocs chaque fois que ses pieds entrent en contact avec le sol pour absorber son poids.

Pour chaque séance [iv], la charge d’entraînement se calcule en multipliant la durée de l’effort (en minutes) par la perception de l’effort (de 1 à 10 sur une échelle de Borg). Le résultat de l’équation est sans unité.
 

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Échelle de Borg (version CR10) : cette échelle note les intensités d’un effort physique de 0 (rien du tout) à 10 (maximal). Elle permet de quantifier la perception de l’effort.]

Source : Adaptée de Foster et al. (2001) [v]


Des chercheurs français, américains et qatariens ont confirmé, en 2017, la validité et la fiabilité de cette formule pour calculer la charge d’entraînement dans plusieurs sports et activités physiques, et auprès d’hommes et de femmes de différentes catégories d’âge (enfants, adolescents et adolescentes, adultes) et de divers niveaux de pratique (amateur et professionnel) [vi]. En plus d’être fiable et validée scientifiquement, cette méthode tient compte de la perception de l’effort spécifique de chaque sportif [vii]. En effet, pour une séance de même durée, la charge d’entraînement peut varier considérablement d’un sportif ou d’une sportive à l’autre. Par exemple, pour une séance de 60 minutes, une personne pourrait percevoir l’effort fourni à 2/10, tandis qu’une autre l’évaluerait à 5/10. Leurs charges d’entraînement s’établiraient donc à 120 (60 x 2) et à 300 (60 x 5), respectivement. Cette approche, en plus de permettre une personnalisation de la charge d’entraînement, s’applique à toute activité physique ou récréative, qu’elle soit pratiquée de manière individuelle ou collective [viii].

La charge d’entraînement hebdomadaire se calcule en additionnant toutes les charges d’entraînement sur l’ensemble de la semaine. Pour Mathilde, qui a nagé 60 minutes le mercredi (sa perception de l’effort était de 4/10) et a couru 30 minutes le samedi (sa perception de l’effort était de 2/10), la charge d’entraînement s’établirait à 60 x 4 = 240 le mercredi et à 30 x 2 = 60 le samedi, pour un total de 240 + 60 = 300 pour la semaine. Dans ce contexte, la charge d’entraînement hebdomadaire offre une base individuelle de référence, permettant ainsi un suivi personnalisé de semaine en semaine.
 

Des applications concrètes

Une charge d’entraînement « idéale » ou « universelle » n’existe pas. Elle restera toujours propre à chaque personne et, par conséquent, le suivi de cette charge doit être individualisé. La littérature scientifique consacrée à la prévention des blessures chez les sportifs et sportives établit toutefois des principes fondamentaux en matière de suivi de la charge d’entraînement [ix]. Tout d’abord, des charges d’entraînement hebdomadaires insuffisantes peuvent aboutir au sous-entraînement, alors qu’à l’inverse, une charge d’entraînement hebdomadaire excessive peut mener au surentraînement. Dans les deux cas, le risque de blessure augmente [x]. Par conséquent, une réduction prolongée de la charge d’entraînement hebdomadaire ne constitue pas forcément la stratégie la plus efficace pour éviter les blessures, car elle peut conduire à un sous-entraînement favorisant leur apparition [xi].

Les études montrent également que ce n’est pas tant la charge d’entraînement hebdomadaire en elle-même qui provoque des blessures, mais plutôt une transition inappropriée (trop forte et trop rapide) vers une charge d’entraînement hebdomadaire plus élevée [xii]. Au rugby et au football, par exemple, des progressions rapides ou excessives de la charge d’entraînement hebdomadaire sont associées à un plus grand nombre de blessures. En effet, lorsque la charge d’entraînement hebdomadaire était brusquement augmentée d’une semaine à l’autre (hausse ≥ 15 % par rapport à la semaine précédente), la prévalence des blessures passait de 21 % à 49 % [xiii].

Par conséquent, maintenir les augmentations hebdomadaires de la charge d’entraînement au-dessous de 10 % est conseillé afin de minimiser le risque de blessures chez les sportifs et sportives. Puisque sa charge d’entraînement hebdomadaire s’établit à 300, Mathilde veillera donc à ne pas l’augmenter à plus de 330 (augmentation de 10 %) la semaine suivante. En revanche, si elle souhaite s’entraîner davantage pendant la semaine, elle pourrait ajouter un court entraînement intense ou effectuer une séance plus longue, mais de faible intensité, afin de respecter sa nouvelle charge d’entraînement.

N’ayant plus aucune douleur au genou et après avoir reçu le feu vert de son kinésiologue *, Alice peut maintenant reprendre la course à pied. Elle prévoit donc un entraînement par semaine au cours du premier mois, puis augmentera progressivement la durée et l’intensité de ses séances sur une base mensuelle, passant de une à deux, puis à trois sessions d’exercice hebdomadaires. Désormais, elle notera chaque entraînement dans un carnet et calculera sa charge d’entraînement hebdomadaire afin de surveiller son évolution. Objectif : zéro blessure.
 

 

— Un article de Robin Mailly, étudiant au programme de doctorat en sciences de l'activité physique à l'Université de Montréal

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