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"Des scientifiques viennent de créer la forme de vie la plus synthétique jamais vue"1 titre récemment une journaliste qui rapporte une percée dans le domaine de la biologie synthétique. Depuis quelques années, cette discipline marque le pas en franchissant des étapes clés aboutissant à la création de nouveaux génomes bactériens. Plus que l'agencement de nouveaux gènes, c'est la modification du code génétique d'un nouvel organisme qui a été annoncé dans cette étude.

Ce n'est pas la première fois qu'une bactérie a été créée avec un code génétique modifié. En 2019, une équipe avait réussi ce tour de force : le micro-organisme en question avait hérité de 61 codons pour le codage des acides aminés au lieu des 64 du code standard universel. Six ans plus tard, une autre équipe parvient à un résultat similaire, mais en éliminant cette fois 7 des 64 codons. En dépit de ces modifications, les nouveaux organismes ont pu croître et se reproduire. 

D'autres travaux permettront-ils d'aller encore plus loin pour obtenir la version la plus minimaliste du code génétique nécessaire à la vie? On peut le penser si les moyens et les efforts se poursuivent dans cette direction. D'ores et déjà, ces résultats nous obligent à conclure que l'existence d'autres codes génétiques est possible. D'où vient, dans ce cas, qu'il n'en existe qu'une seule version sur notre planète? 

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Prenant en compte la complexité et la diversité de l'évolution du vivant, une autre interrogation pointe le bout de son nez : si le codage pour l'obtention des acides aminés peut exister en plusieurs versions, qu'est-ce qui aurait pu empêcher la vie d'évoluer de façon à pouvoir utiliser plusieurs versions de codes génétiques? Pourquoi un même organisme n'aurait-il pas pu articuler l'utilisation de deux ou trois codes génétiques de façon à s'octroyer plus de possibilités de codage et bénéficier ainsi d'une plus grande souplesse d'adaptation?

L'une des réponses à cette question est peut-être à trouver dans une découverte récente. Une grande partie de l'ADN des organismes est constitué de "gènes sauteurs", des éléments qui passent sans cesse d'un endroit à l'autre sur les chromosomes. Il s'agirait des vestiges d’anciens virus qui auraient infecté le patrimoine génétique des organismes, il y a des dizaines voire des centaines de millions d’années, se reproduisant de manière répétitive jusqu’à occuper une proportion prépondérante de l'ADN. Les résultats annoncés récemment par une équipe de recherche affirment que ces éléments transposables trahissent une fonction régulatrice sophistiquée : de nos jours, ces séquences auraient évolué de façon à agir comme des interrupteurs biologiques, contrôlant quand et comment nos gènes s’expriment. C'est sans nul doute l'une des grandes découvertes dans le domaine de la génétique, si elle se confirme. Elle nous offre, par le fait même, une explication possible à notre questionnement précédent. Étant d'origine virale, ce mécanisme a pu se mettre en place et évoluer très précocement. Il a pu permettre aux organismes de bénéficier d'une sophistication dans le domaine de la régulation du codage de ses protéines et, par le fait même, éviter d'avoir recours à la nécessité d'utiliser deux ou plusieurs codes génétiques pour s'assurer d'une souplesse d'adaptation suffisamment grande. En d'autres mots, la vie, à l'échelle moléculaire, aurait suivi le cheminement évolutif le plus rapide à se manifester pour se complexifier, laissant de côté d'autres options possibles. C'est une idée à méditer... 

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