"Depuis 1996, tout le Grand Nord est exploré, avec beaucoup de sociétés actives à la Baie James, SOQUEM, Ashton Mining of Canada, De Beers, Superior Diamonds, Dios, Majescor, Dianor, entre autres. Les régions de l'Abitibi, Pontiac, et Chapais Chibougamau sont aussi actives" résume Tyson Byrkett, géologue de la Société québécoise dexploration minière (SOQUEM Inc.).
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La présence de micro diamants dans les roches de l'Est de l'Ungavva était connue. " Seulement, il n'y avait pas de vrai potentiel commercial dans ces roches", ajoute Tyson Byrkett. Et c'est arrivé à ce stade que le mystère règne. En dépit de nombreuses questions, rien ne transpire sur les détails. Il faut bien avouer que, contrairement à l'or, trouver des diamants demande de multiples expertises, du temps... et connaître l'histoire géologique du Canada.
Le Canada en tête
Au Canada, si les premières explorations systématiques s'amorçaient déjà dans les années '60, il a fallu 30 ans pour qu'elles donnent leur premier fruit avec la découverte d'une kimberlite diamantifère en 1991. Une kimberlite est la roche mère où se forment les diamants.
Quinze ans après cette trouvaille, la course aux diamants se révèle très gratifiante, les deux principales mines en exploitation dans les Territoires du nord-Ouest, au 52e parallèle et plus au nord placent déjà le Canada en 3e place des pays producteurs de diamants.
Depuis, il y a beaucoup d'activités, surtout dans les TNO mais aussi en Ontario, au Manitoba, en Saskatchewan et en Alberta. Les régions les plus propices à la découverte de kimberlites diamantifères sont les parties les plus âgées du Bouclier canadien, donc des régions où les roches sont âgées de plus de deux milliards d'années. Au Québec, ces roches sont situées grosso modo au nord du 52e parallèle, soit à peu près à la latitude de la baie James et plus au nord dans le Nunavik.
La contagion
Il y a moins de dix ans, cette fièvre a gagné le nord du Québec. Certes, un géologue nommé Robert Bell fouillait déjà en 1895 le canton de l'Isle-Dieu (Matagami), et on recense diverses recherches dans le lit de trois rivières de la région en 1912 et 1928... mais sans aucun résultat. En 1996, le joint venture Soquem-Ashton a entrepris des travaux de reconnaissance dans une vaste région du nord, entre les 50e et 60e parallèles. Les géologues ont procédé à l'échantillonnage de sédiments d'eskers. Ces petits lits de ruisseaux composés de dépôts de sable et de gravier proviennent des eaux de fonte de glaciers. C'est là que des compagnies majeures De Beers et BHP Billiton se sont jetées dans la course. Et à l'automne 2001, le tandem Soquem-Ashton a annoncé la découverte de cheminées kimberlitiques dans la région de la Baie James. Le camp "secret" est situé entre la rivière Eastmain et le lac Mistassini.
"C'est la découverte de fragments rarissimes provenant de roches kimberlitiques qui nous permet éventuellement de trouver des diamants, mais cela nécessite de longues années de recherche dans la plupart des cas", explique Michel Parent, de la Commission géologique du Canada.
Ce géologue du Quaternaire s'intéresse à l'action des anciens glaciers. Il est l'un des rares capables de lire le paysage afin de retracer les kimberlites. Les anciens glaciers qui recouvraient durant les deux derniers millions d'années de grandes parties des continents de l'hémisphère nord en ont érodé la surface de façon plus ou moins intensive. Puis les glaciers ont transporté les fragments de roche de toutes tailles, souvent à de grandes distances de leur lieu d'origine. Il faut donc reconstituer la dynamique des mouvements glaciaires pour élucider la provenance d'un diamant.
Ensuite, il faut aller sur le terrain. Au grand bonheur de Michel Parent (photo ci-haut). "Ce n'est pas possible de voir les égratignures de la glace sur le roc, d'identifier les kimberlites et les minéraux indicateurs du haut d'un avion."
Des yeux de lynx, du flair et de la technologie
Une fois sur place, les kimberlites sont très reconnaissables. D'un beige particulier, elles se cachent dans des trous du paysage s'étalant sur une surface modeste, à peine quelques centaines de mètres. Il y a souvent des essaims de kimberlites... mais seulement une kimberlite sur 100 est diamantifère !
Pour identifier les "bonnes" kimberlites, il faut analyser les divers minéraux qu'elles contiennent. Les géologues vont recueillir des kilos d'échantillons sur différents sites, les transporter par hélicoptère et les identifier. Ils seront envoyés à un laboratoire où un minéralogiste les inspectera.
Tout cela prend du temps. "Il est normal de prendre de huit à dix ans entre la découverte et la construction d'une mine, relève Tyson Byrkett. Et même une fois la kimberlite diamantifère trouvée, ce n'est pas fini : il faut extraire les diamants au sein d'un territoire généralement éloigné et sortir un solide d'un autre solide sans pour autant broyer les diamants. Une des techniques fait circuler les pierres concassées au sein d'une machine sous-pression avec un mélange d'eau et de particules ferrosilicones; les morceaux les plus denses coulent au fond et sont récupérés pour le tri. Une autre machine bombarde de rayons X les pierres qui avancent le long d'une rampe. Les diamants deviennent fluorescents sous ce bombardement.
Dans tous les cas, les yeux des minéralogistes sont sans doute les instruments les plus précieux. Ce sont eux qui vont reconnaître les minéraux indicateurs, distinguer les variations et ainsi isoler les diamants. Seuls les plus purs se transformeront en bijoux de prix. "Ce sont eux, avec leur grande qualité, portent la mine", avoue Tyson Byrkett. Pour eux, que d'efforts déployés !