BREST - Ce n’est pas parce que la mer est d’huile, qu’elle est tranquille et uniforme. Son " climat " est perturbé par toutes sortes de tourbillons énergiques. Un quart à un tiers de l'eau chaude et salée de l'océan Atlantique qui arrive de la Méditerranée provient de certains de ces tourbillons appelés meddies. Ils interfèrent avec les courants océaniques et ont d’importantes conséquences sur le système climatique mondial; surtout quand on se rappelle que l’eau de la Méditerranée s'est réchauffée dans les 50 dernières années.

La circulation profonde des océans, dite thermohaline, est essentiellement due aux contrastes de densité entre les différentes eaux, la densité de l’eau de mer étant établie en fonction de la pression, de la salinité et de la température", explique un chercheur au Laboratoire de physique des Océans à Brest, Xavier Carton. Il a consacré une partie de sa vie aux meddies. Ces tourbillons re-salinisent l’Atlantique à des profondeurs moyennes de 1000 mètres et jouent sur la circulation des océans.

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Les meddies naissent près du détroit de Gibraltar, entre l’Espagne et le Maroc, là où l’Atlantique rencontre la Méditerranée. L’eau dense méditerranéenne tombe en cascade au fond de l’Atlantique et l’eau plus douce de l’océan part dans la Méditerranée, en surface. Par la force de Coriolis –la force de la rotation de la Terre sur elle-même– cette eau chaude est emmenée sur la droite et reste plaquée sur le continent pendant 300 km. Après quoi, le courant se déstabilise et forme les meddies, qui se propagent dans l'océan. Ces tourbillons ont la forme d’une crêpe et mesurent de 800 à 1000 mètres d’épaisseur pour 50 à 100 kilomètres de diamètre. Chaque année, il naît de 10 à 20 de ces tourbillons. Les plus costauds peuvent vivre de 3 à 4 ans.

Entre terre et mer

Ce ne sont pas les seuls courants à agiter les mers du globe. En Atlantique, des courants profonds amènent les eaux fraîches du pôle vers l’équateur tandis qu'en surface, se transporte la chaleur de l’équateur vers le pôle. C’est ce grand mouvement qui est appelé circulation thermohaline. " Ce courant est très lent. Une molécule d’eau prendra 1000 ans pour passer à travers tout le cycle ", explique la chercheuse à l'Université Pierre et Marie Curie à Paris, Pascale Bouruet-Aubertot. Or, si la densité de l’eau changeait de façon significative, la distribution et la force de ces courants profonds pourraient être modifiées. Si le climat se réchauffe, ce phénomène pourrait être encore plus perturbé.

Le rôle de l’océan est central pour le climat planétaire. Les vents entraînent les courants de surface océaniques, comme le Gulf-Stream. De son côté, l’océan cède de sa chaleur à l’atmosphère. Si la distribution de chaleur dans l’océan est modifiée, la chaleur cédée par l’océan à l’atmosphère ne sera donc pas la même. Par conséquent, les vents en seront changés, de même que les courants marins et ainsi de suite. " Une variable telle que l'ensemble des meddies peut perturber ce cycle ", explique Xavier Carton.

La communauté scientifique est loin de comprendre tous les mécanismes qui régissent ce réchauffement. L’impact exact du réchauffement de l'eau méditerranéenne en Atlantique n'est que l'un des éléments qui est loin d’être élucidé.

Le billet d'avion et le séjour en France ont été rendu possibles par une bourse du Consulat général de France à Québec, de l'Office franco-québécois pour la jeunesse et d'Algorithme Pharma.

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