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D’ici la fin de l’année, nous serons 7 milliards. En 2045, probablement 9 milliards. La planète peut-elle tenir le coup?

Un dossier paru dans l’édition de janvier du National Geographic rappelle que la démographie a toujours été la science de l’alarmisme. Un de ses pères fondateurs, Sir William Petty, estimait que la population mondiale allait doubler six fois avant le Jugement dernier. Ce qui serait plus que la planète ne pourrait supporter, donc, guerres et famines. Donc, le Jugement dernier.

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Certains connaissent davantage Thomas Malthus qui, en 1798, en fit sa Loi des populations : toute croissance démographique finirait « inévitablement » par dépasser la croissance de nourriture, jusqu’à ce que des guerres et des épidémies ne réduisent la population. Ce qu’il n’avait pas prévu, c’est qu’à la même époque, un nommé Edward Jenner annoncerait une découverte qui changerait la lutte contre les épidémies : la vaccination.

Bref, c’est un air connu : doit-on s’alarmer de la démographie galopante, ou bien la science continuera-t-elle de trouver des solutions?

Pas juste un problème de démographie

Or, ce que conclut le dossier du National Geographic, dans la foulée de quelques auteurs récents, c’est qu’avec 7 milliards, ou 8, ou 9, ce n’est plus un problème de démographie. D’une part, le taux de fertilité a diminué de 40% depuis les années 1970 : aussi, bien que le taux d’enfant par femme soit encore très élevé dans plusieurs pays d’Afrique, leur croissance démographique ne pèsera pas si lourd, à côté du milliard d’Indiens et du milliard et demi de Chinois. Autrement dit, quoi qu’il arrive en Afrique, la population mondiale va se stabiliser à un moment donné dans le prochain demi-siècle.

Si ce n’est plus juste un problème de démographie, c’est parce qu’avec l’érosion des terres arables qui est un problème mondial, la diminution des nappes d’eau souterraines, l’épuisement des réserves de poissons un peu partout, le partage des ressources disponibles se pose de façon plus épineuse que jamais auparavant dans l’histoire.

Un rapport de chercheurs français en agro-alimentaire, paru le 13 janvier, arrive à une conclusion similaire, par des voies différentes : pour nourrir 9 milliards de personnes, écrit Agrimonde, les pays riches devront réduire le gaspillage... et la consommation de viande.

Des États en cours de désintégration

Lester Brown, de l’Institut Worldwatch, auteur du best-seller Le Plan B, illustre depuis quelques années notre gaspillage des ressources naturelles par une expression d’économiste : les humains vivent sur leurs épargnes. Il donne dans son livre plusieurs exemples de sociétés dont la sur-utilisation des ressources —leurs épargnes— a contribué à leur effondrement, comme l’Ile de Pâques ou, plus près de nous, Haïti (et il écrivait ces lignes en 2006) :

Haïti représente un cas d’école de « dépassement de charge et effondrement ». Les arbres ont été détruits en premier, puis les sols, et finalement la société elle-même. Sans approvisionnement de l’étranger, la population haïtienne serait décimée par la famine.

Qu’arrive-t-il s’il n’y a même pas d’approvisionnement de l’étranger? Ce que Brown appelle un « État défaillant », ce que le Royaume-Uni appelle un « État fragile », ce que la CIA appelle un « État en cours de désintégration » —et elle en énumère une vingtaine.

Arrivé à ce stade, on a donc largement dépassé le problème de la lutte contre la surpopulation : plutôt une lutte pour repenser notre façon de dépenser nos épargnes. C’est cela que Brown appelle le « Plan B » :

La restructuration de l’économie conformément aux principes de l’écologie représente la plus grande opportunité d’investissement dans l’histoire. En importance, cette révolution environnementale est comparable aux révolutions agraire et industrielle qui l’ont précédée. (...) L’entrée en guerre des États-Unis [lors de la 2e Guerre mondiale] est un cas d’école spectaculaire en terme de rapidité de mobilisation... Rétrospectivement, la vitesse de cette conversion d’une économie de temps de paix à une économie de temps de guerre est frappante.

Une telle mobilisation suppose la restructuration de l’économie pour restaurer les écosystèmes sur lesquels elle s’appuie, éradiquer la pauvreté et stabiliser la population mondiale. Nous disposons de la technologie, des instruments économiques et des ressources financières nécessaires à la réalisation de ces objectifs.

Nous disposons des outils, mais commencerons-nous à les utiliser avant qu’il ne soit trop tard? C’est la question à 7 milliards.

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