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Il est probable que le réchauffement climatique a déjà accru les risques d’événements extrêmes... mais il est impossible de lier les événements extrêmes au réchauffement climatique. Cette conclusion alambiquée d’un document publié par le GIEC, a mécontenté les uns et déçu les autres.

Le document préliminaire, produit à l’intention des décideurs qui se réunissent la semaine prochaine en Afrique du Sud, a été abondamment couvert par les médias après sa parution le 19 novembre. C’est la première fois que le GIEC s’avance sur le terrain délicat des événements extrêmes et, à défaut de pouvoir prouver l’existence d’un lien, il s’est aventuré du côté des conséquences: y aura-t-il davantage d’ouragans, de précipitations, de dégâts?

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Les réponses sont oui et... peut-être. Il est incontestable que des températures plus élevées provoquent davantage d’humidité dans l’air, donc davantage de précipitations. Avec davantage de précipitations viennent donc davantage d’inondations, comme celles qui ont frappé le Pakistan en 2010, et une partie de l’Amérique du Nord en 2011, du Mississippi jusqu’à la rivière Richelieu. Mais à partir de combien de degrés, quand, à quels intervalles? Réponses impossibles pour l’instant.

Des événements extrêmes sont rares, ce qui signifie qu’il y a peu de données disponibles pour faire des prévisions sur des changements dans leur fréquence ou leur intensité. Plus rares sont les événements, plus difficile est-il d’identifier des changements à long terme.

On peut s’en étonner quand on se rappelle que d’autres études ont déjà fait de tels liens pour des événements régionaux. Plus tôt cette année par exemple, les Américains Stefan Rahmstorf et Dim Coumou concluaient dans la revue PNAS que la vague de chaleur extrême qui avait frappé Moscou en 2010 avait 80% de chances d’avoir été amplifiée par le réchauffement climatique. Le mois dernier, une étude de la NOAA associait au réchauffement les sécheresses plus fréquentes des 20 dernières années dans le pourtour méditerranéen.

L’un des problèmes, c’est que ces rapports du GIEC ne sont pas des études scientifiques: ce sont des documents qui font la synthèse des connaissances et dont la rédaction est le fruit d’un consensus. Il suffit donc d’une objection émise par un des coauteurs pour qu’un paragraphe adopte un style plus prudent.

L’autre problème est de passer de l’échelle du prochain siècle à celle de la prochaine décennie —celle qui, après tout, nous concerne directement lorsque nous évoquons la crainte d’un événement météorologique extrême : il est incontestable qu’à long terme, le réchauffement entraînera davantage de sécheresses et d’inondations, d’ouragans et de tornades. Mais où et quand? Le Texas, frappé cette année par la pire sécheresse en plus d’un siècle, devrait-il se préparer déjà pour la prochaine, ou estimer que les statistiques l’épargneront pour un bout de temps?

Le rapport offre tout au plus des moyennes : une région frappée maintenant par «un record de chaleur de 20 ans» est «plus susceptible» de vivre ce record tous les deux ans avant la fin du siècle. Le nombre de journées et de nuits chaudes est en croissance. La fréquence et l’intensité des précipitations vont augmenter «dans les hautes latitudes et les régions tropicales». La quantité mondiale de canicules va augmenter, et la quantité mondiale de vagues de froid va diminuer. Tout cela est important d’un point de vue statistique, mais généralement jugé trop vague par les décideurs politiques, ce dont sont conscients les auteurs:

Plusieurs mesures, si elles sont implantées efficacement, ont leur raison d’être sous une grande fourchette de futurs climats... Des systèmes qui préviennent les citoyens de désastres à venir; des changements dans la planification de l’usage du territoire; une gestion durable des terres; une gestion des écosystèmes; des améliorations dans le suivi de la santé, des réserves d’eau et des systèmes de drainage; le développement et l’application de codes de construction...

Ce rapport préliminaire sera discuté lors de la conférence annuelle des Nations Unies sur les changements climatiques, qui aura lieu du 28 novembre au 9 décembre à Durban, en Afrique du Sud. Et la version complète sera publiée en février 2012.

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