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Si, politiquement, l’entente de Durban est un pas en avant, scientifiquement par contre, elle permet de voir l’avenir plus clairement: les enfants d'aujourd'hui seront dans une pire situation que ceux d'hier.

Comme l’avaient répété de nombreux observateurs avant la Conférence de Durban, l’objectif de limiter la hausse des températures à deux degrés par rapport au XIXe siècle, était déjà très improbable. Aujourd’hui, c'est pire: selon le Climate Action Tracker —un groupe d’observateurs scientifiques— il faut plutôt envisager que nos descendants vivront avec trois degrés, voire trois et demi, de plus.

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Concrètement, qu’est-ce que cela veut dire? Voir encadré.

- À un degré et demi d’augmentation par rapport à l’ère pré-industrielle (nous sommes actuellement à 0,7 degré), on parle d’extinctions d’espèces et de déclin de l’agriculture dans les régions les plus pauvres du globe.

- À deux degrés, on parle de sécheresses accrues et de déclin de l’agriculture à l’échelle planétaire.

- À trois degrés, on parle de la débâcle de la forêt amazonienne et de la forêt boréale, entre autres.

Or, pourquoi serions-nous à présent en route vers 3 degrés plutôt que 2? Parce que tout le CO2 que nous envoyons aujourd’hui dans l’air y restera longtemps, même si nous sortions du pétrole dans les années 2050. Et pour l’instant —en tout cas pas avant 2015, plus probablement 2020— l’entente n’oblige pas qui que ce soit à émettre une seule molécule de CO2 en moins.

Les pays qui, avant Durban, s’étaient déjà donné des objectifs de réduction des gaz à effet de serre pour l’horizon 2020 —en particulier l’Union européenne— continueront en ce sens, mais ces diminutions étaient déjà dans les calculs des scientifiques qui nous annonçaient un «déficit de gigatonnes». Traduction: il s'agit de la quantité de CO2 que nous produirons en trop en 2020, qu’il faudrait ramener à zéro si on voulait éviter de dépasser la limite des deux degrés (plus de détails sur le déficit des gigatonnes ici).

Ce déficit était évalué le mois dernier entre 6 gigatonnes (si tous les pays respectent d’ici 2020 leurs engagements) et 11 gigatonnes (le scénario pessimiste). À titre de comparaison, six gigatonnes, c’est la quantité de CO2 émise par les États-Unis en un an.

Donc, si nous —la planète— ne réduisons pas nos émissions de six autres gigatonnes d’ici 2020, la température moyenne du globe dépassera le cap des deux degrés au milieu du siècle, et la hausse se poursuivra jusqu’à au moins trois degrés.

Durban n’a rien changé à cette réalité, elle l’a juste rendue plus claire.

Il est certes possible que l’entente de Durban conduise en 2015 ou 2016 à une nouvelle entente contraignante pour tous les pays, comme l’avait été Kyoto pour les pays riches: après tout, c’est sur cet espoir qu’une entente a été signée à l’arraché dans la nuit de samedi à dimanche. Il n’est pas impossible non plus que ces pays, en 2015 ou 2016, s’entendent sur des objectifs de réduction des gaz à effet de serre plus ambitieux. S’il finit par voir le jour, le Fonds vert pour les pays en voie de développement pourrait y aider, en facilitant leur passage à des économies plus propres.

Mais dans le meilleur des cas, ce seront des objectifs qui seront votés en 2020, pour l’horizon 2030 ou 2040, et pendant ce temps, le compteur tourne...

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