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Anciennes victimes de l’acidité industrielle, les lacs québécois témoignent à présent des stress liés aux activités minières et agricoles. Sans compter que leurs eaux douces pourraient aussi subir les assauts des changements climatiques.

«Seront-ils capables de réaliser des changements évolutifs? Avec ce grand dérangement, nous risquons de ne pas être capables d’entamer un rétablissement de ce milieu de vie», avance Alison Derry, chercheuse au département des sciences biologiques de l’Université du Québec à Montréal.

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Depuis qu’elle a les pieds dans l’eau —Alison Derry a été élevée sur le bord du Lac Ontario! —, la chercheuse constate de nombreux changements au sein de ces écosystèmes aquatiques. Et aujourd’hui, elle désire mieux les cerner grâce à son projet «Réactions écoévolutives dans les écosystèmes aquatiques canadiens sous le stress anthropogénique présent et futur», pour lequel elle a reçu 300 000$ de la Fondation canadienne pour l’innovation.

Avec les coupes forestières et les activités minières, les impacts se font déjà sentir sur le zooplancton, issu d’une longue évolution, et dont se nourrissent de nombreux invertébrés et poissons. «Le zooplancton, même si ce n’est pas un animal très sexy, s’avère un bon indicateur pour la qualité de l’eau. Il est moins performant quand son milieu change rapidement», explique-t-elle.

Des simulations sur le terrain réalisées par la chercheuse et ses étudiants indiquent déjà une baisse de la productivité du zooplancton, une modification de sa taille et sa reproduction lorsque des changements écologiques surviennent (modification du pH de l’eau ou de sa turbidité). Avec les récents développements du Nord du Québec, ces espèces subiront un stress accéléré, qui les amènera à évoluer ou à même à céder leur place, pense-t-elle.

Plongée en eaux troubles

Le biologiste de l’Institut national de la recherche scientifique, Michel Lavoie, se penche aussi sur l’un des premiers maillons de la chaîne alimentaire : le phytoplancton. À l’aide de ces algues microscopiques, il veut optimiser un modèle qui prédit la toxicité des métaux sur les organismes d’eau douce, mais aussi s’en servir pour réguler les changements climatiques.

«Nous faisons croître des algues en laboratoire pour analyser se qui se produit à l’intérieur des cellules lorsque le milieu est fortement pollué. Le cadmium, un sous-produit de l’activité minière, diminue de 25% la reproduction et le bon développement de ces microorganismes», explique le chercheur.

Ses collègues ont remarqué que le cadmium possédait la même porte d’entrée dans la cellule que le zinc et le cobalt, des métaux essentiels à la survie des algues. S’ils se retrouvent en plus grande concentration dans l’environnement, ces métaux pourraient avoir un effet protecteur sur les algues. Consommés par le zooplancton, ces microorganismes, en bonne ou mauvaise santé, influencent la qualité des eaux.

Ce n’est pas tout, l’étudiant au post-doctorat de l’Université Laval, pense que ces algues pourraient avoir également une influence positive sur le climat grâce au cycle biochimique du soufre au sein des microorganismes. Les algues vertes synthétisent le soufre pour maintenir leur osmorégulation, puis rejettent un gaz volatil, le sulfure de diméthyle.

Bien que cela soit encore débattu dans la communauté scientifique, ces rejets soufrés pourraient être bénéfiques, car ils refroidiraient l’air ambiant. «Les algues permettraient donc de faire leur part dans la lutte aux changements climatiques», soutient le jeune chercheur. Et ce minuscule espoir n’est pas à négliger, selon lui.

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