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Les publicités trompeuses de Friends of Science ont fait réagir de nombreux Québécois et ce ne serait pas sans raison.

«Au Québec, l’opinion publique est vaccinée contre les climatosceptiques. Les médias, et surtout la presse québécoise, n’embarquent pas dans ces campagnes niant les changements climatiques», avance Sebastian Weissenberger, professeur en sciences de l’environnement de l’Université du Québec à Montréal.

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Alors que le Conseil des normes canadiennes de la publicité a livré son verdict, en blâmant l’organisme climatosceptique, le congrès de l’Association francophone pour le savoir (ACFAS), qui se déroule cette semaine à Rimouski, rejoint l’actualité. Le chercheur, contacté plus tôt la semaine dernière, y présente la conférence Le climatoscepticisme: quels vecteurs, quelles influences et quelle légitimité? Une comparaison des sphères anglophones et francophones au sein du colloque Critiquer la science aujourd’hui: pourquoi? comment?

Bonne nouvelle, le Québec fait bande à part. Alors que 50 % des Américains doutent des changements climatiques et bon nombre de Français aussi, les Québécois semblent épargnés. «Il n’y a pas ici de scientifiques, ni de médias, pour véhiculer les messages des climatosceptiques, contrairement aux grandes figures américaines influençant l’opinion. La population est donc peu exposée aux messages négationnistes. D’où sans doute, la nécessité pour les climatosceptiques de passer leur message par la publicité», explique-t-il.

L’exception québécoise

Pas de Claude Allègre, de Marcel Leroux et autres «vedettes négationnistes» au Québec donc, ni de grandes campagnes destinées à convaincre un vaste public, ce que le chercheur appelle le «Denial Machine», ou machine de la négation.

Opérant aux États-Unis, en Australie et au Canada, ce système bien rodé repose sur un réseau de production et de diffusion de messages et d'informations climatosceptiques, relayés par la chaîne de télévision Fox News, le quotidien The Sun et même le National Post, mais aussi par des climatosceptiques professionnels —le plus souvent payés par l’industrie pétrolière— et des politiciens ayant embrassé la cause.

Cette machine table aussi sur le pouvoir de propagation d'Internet. «Même les scientifiques formés ont du mal à combattre cette machine de diffusion alors comment voulez-vous que le grand public parvienne à se faire une idée claire», indique le chercheur. Sans compter que tout le monde ne lit pas avec aisance les rapports du GIEC et les recherches scientifiques, qui vont pourtant tous dans le sens des changements climatiques.

La campagne de publicité de Friends of Science n’a pas surpris le chercheur. Il la juge peu originale, tout comme le récent rapport des climatosceptiques canadiens soutenant que les changements climatiques, c’est fini! «C’est assez amateur et ça comporte de nombreuses erreurs scientifiques de base», note-t-il. Il souligne d’ailleurs le rôle essentiel des journalistes et des communicateurs scientifiques pour combattre ces fausses affirmations. «Il faut laisser les intermédiaires vulgariser, car les scientifiques ne sont pas toujours à l’aise pour se lancer dans l’arène.»

Par ailleurs, il se dit peu impressionné par la réplique de Friends of Science, à la réprimande du Conseil des normes canadiennes de la publicité, qui invite maintenant l’astrophysicien Nir Shaviv à contribuer au débat. «Ce chercheur a présenté une hypothèse compliquée sur le rôle que pourraient jouer les rayons cosmiques sur le climat. Cette influence serait négligeable et sa thèse a été depuis critiquée.»

Mais finalement, ce qui le navre dans toute cette affaire, c’est l’intérêt plus grand que l'on porte au climatoscepticisme que pour les gens touchés par les conséquences des changements climatiques.

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