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PARIS - Pour sauver les îles menacées de disparition si les océans continuent de monter, faudra-t-il passer par une élimination de leurs dettes, plutôt que par des injections d'argent neuf? C'est ce qu'il semble, à en juger par une annonce de la République des Seychelles pendant la COP21 —et à en juger par les autres États insulaires qui font la file.

 

Un effacement de 30 millions$ de la dette des Seychelles en échange de la création par cet État d'une zone marine protégée de 400 000 kilomètres carrés: c'est ce qui a été annoncé lundi à la conférence de Paris sur le climat (COP21), en présence de ministres et d'ambassadeurs de quelques pays —dont la France et l'Afrique du Sud qui, de concert avec l'organisme Nature Conservancy, ont mené à bien cette entente.

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La République des Seychelles, 90 000 habitants, est composée de 115 îles dans l'océan Indien. Quelques dizaines sont des îlots de granit dont seule une très mince bande de territoire, au bord de la mer, est habitée. C’est là que se trouvent toutes les infrastructures-clefs —l'aéroport, les routes, les hôpitaux, le plus gros des services publics, ainsi que les infrastructures touristiques auxquelles le pays doit sa plus grosse source de revenus. Et tout cela se retrouvera submergé si les océans doivent grimper d'un mètre ou plus. «Nous perdrons probablement 80% des îles et toutes les zones importantes qui font des Seychelles un pays viable», nous a expliqué le ministre de l’Environnement Didier Dogley, après l'annonce de lundi.

Les Seychelles ne sont évidemment pas seules à se retrouver sur la ligne de front des changements climatiques: l'Alliance des petits États insulaires, qui compte 39 membres, tente depuis 2009 de convaincre le reste de la planète de viser une augmentation d’un degré Celsius et demi, plutôt que deux degrés.

Mais en plus d'être sur la ligne de front, ils ne sont pas dans la ligue des pays les plus riches. Aux Seychelles, un effacement de la dette libérera opportunément un demi-million en paiements d'intérêt par année, en plus de rendre les créanciers soudain plus ouverts à des demandes d'argent neuf —c’est du moins l’espoir du gouvernement là-bas.

Le ministre de l’Environnement précise du même souffle que les besoins réels pour l’adaptation aux changements climatiques —réparer ou déplacer les infrastructures endommagées par les inondations et les ouragans, améliorer les conditions de vie des populations affectées— pourraient s’élever à 300 millions. «Mais si nous avions attendu pour les 300 millions, nous en serions arrivés à un point où il n’y aurait plus eu d’île.»

L'absence d'argent neuf ne semblait donc pas un enjeu lundi: au cours de l'événement tenu en marge de la COP21, des représentants de quatre pays —les îles Marshall, la Grenade, la Jamaïque et Cuba— sont tour à tour venus dire au micro combien ils enviaient leur homologue des Seychelles et espéraient être les prochains sur la liste.

L'ambassadeur des Seychelles pour les questions climatiques, Ronald Jumeau, a dit voir dans cette entente une occasion de changer le message: plutôt que de présenter les États insulaires comme des victimes, les présenter comme «des incubateurs de solutions».

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