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Ce n’est pas au début des années 1980, ni à la fin des années 1970, ni à la fin des années 1960, mais au milieu des années 1950 qu’au sein des compagnies pétrolières, la sonnette d’alarme sur les risques des changements climatiques a commencé à sonner.

En 2015, une série d’enquêtes journalistiques révélaient qu’à partir de 1977 et pendant une dizaine d’années, les multinationales du pétrole avaient conclu que le réchauffement climatique était un risque bien réel, sur la base de leurs propres recherches scientifiques. Par la suite, ces compagnies se mettraient à dépenser des millions de dollars en relations publiques et en lobbying pour convaincre les politiciens et le grand public que le réchauffement climatique n’existe pas ; et à supposer qu’il existe, qu’il n’était qu’un phénomène naturel.

En 2016, des chercheurs en droit de l’environnement mettaient à jour et republiaient un rapport plus ancien, remontant cette fois à 1968. Il avait été soumis à l’association des compagnies pétrolières américaines (American Petroleum Institute) et les prévenait du risque pour la planète d’une trop grande quantité d’émissions de CO2.

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Or, voilà que de nouveaux documents font remonter l’aiguille encore plus loin. En 1954, le géochimiste Harrison Brown et ses collègues de l’Institut de technologie de Californie présentaient à l’American Petroleum Institute (API) un rapport sur « la détermination des variations et des causes de la composition isotopique du carbone dans la nature ». En d’autres termes : ces chercheurs confirmaient ce que d’autres commençaient à soupçonner : la planète subissait une hausse relativement récente du CO2 dans son atmosphère et dans son eau, après que ce gaz fut pourtant resté dans des proportions constantes pendant des milliers d’années. Au cours des quatre années suivantes, l’API allait financer des projets de recherche visant à mettre au point des méthodes de calculs plus précises de ces concentrations de CO2. En 1959, le physicien Edward Teller — l’un des pères de la bombe H — s’adressait directement aux chefs de l’industrie pétrolière pour les prévenir des risques posés par l’accumulation de CO2 dans l’atmosphère : hausse des températures et hausse du niveau des eaux d’ici la fin du siècle, prédisait-il.

Ces avertissements et ces rapports sont d’autant plus étonnants pour l’histoire de la climatologie que l’on considère plutôt 1960 comme la date-clef. Cette année-là, un scientifique nommé Charles Keeling publie dans la revue Tellus les résultats de mesures de l’atmosphère prises en Antarctique depuis trois ans. Il y écrit que les concentrations de CO2 augmentent « presque au rythme auquel on serait en droit de s’attendre compte tenu de la combustion (planétaire) de carburants fossiles ». Les sciences de l’atmosphère désignent aujourd’hui sous le nom de courbe de Keeling l’augmentation progressive du CO2 dans l’atmosphère, depuis le début de l’ère industrielle.

Ce sont ces avertissements publics et ces données qui conduisirent le président américain Lyndon B. Johnson, en 1965, à publier à son tour un document prévenant des risques d’un réchauffement climatique provoqué par l’activité humaine. C'était il y a 53 ans.

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