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On a mesuré depuis longtemps le coût de production plus élevé d’un aliment « bio » par rapport au même aliment provenant de l’agriculture dite « conventionnelle ». Mais quel impact sur le prix des aliments en général aurait une expansion des cultures biologiques?

C’est l’exercice auquel se sont attelés trois chercheurs du département d’agriculture et de ressources économiques de l’Université de Californie. Dans un article paru au début d’août, ils écrivent que « d’augmenter la part de l’agriculture biologique dans les pays riches de 3 à 15% augmenterait le prix des aliments dans les pays pauvres jusqu’à 6,3%, avec des médianes de 1,2 à 2,5% ». Il faut noter que dans certains pays, la part du bio dans l’agriculture est déjà plus élevée: elle était par exemple estimée à 9% dans l’Union européenne en 2020. 

La question de l'expansion du bio devient de plus en plus importante, soulignent-ils, à l’heure où plusieurs États subventionnent cet élargissement, au nom de la protection de l’environnement ou de la diversification de l’offre alimentaire. Ainsi, leur hypothèse d’une augmentation de 3 à 15% s’appuie sur les politiques annoncées par les plus importants pays producteurs, sur un horizon de 10 à 15 ans. 

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Or, si on connaît les coûts de production à la pièce de certains aliments bio, peu de recherches ont tenté d’évaluer l’impact économique plus global que cela aurait sur l’accès à des aliments, spécialement chez les populations plus pauvres. 

Leurs calculs ont porté sur les quatre grandes cultures: blé, riz, maïs et soya. Et leurs modèles « indiquent que les fermiers dans les pays pauvres bénéficieraient de prix plus élevés pour les cultures, tandis que les consommateurs des pays riches ne seraient en général pas affectés, et pourraient parfois en bénéficier ». Mais dans tous les scénarios envisagés, ce sont les consommateurs des pays pauvres qui porteraient le plus gros du fardeau, avec cette augmentation des prix: une augmentation du prix des aliments de 6% dépasserait leur capacité de payer. 

La raison n’est même pas une hausse d’une production locale que les consommateurs ne pourraient pas se payer. C’est plutôt que les pays riches, en « réduisant la production conventionnelle locale et, en conséquence, les exportations » vers les pays pauvres, amplifieront « la pénurie alimentaire, poussant à la hausse les prix de la nourriture et de la location des terres ». Cela, en plus du fait que cette rareté peut conduire à élargir les terres agricoles dans ces pays, avec des conséquences environnementales qui, elles, ne peuvent pas encore être mesurées. 

Au final, concluent ces chercheurs, leurs calculs visent à combler un vide dans la recherche. Ils n’ont pas la capacité de prédire « le » scénario d’avenir, tant les variables sont nombreuses. Et ils ne peuvent pas non plus prétendre pouvoir faire des prédictions pays par pays. Mais ils espèrent donner des idées à d’autres chercheurs… 

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