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En temps de pandémie, il faut se réinventer. Pourquoi pas en se tournant vers l’économie circulaire? Elle vise à optimiser l’utilisation des ressources par les entreprises industrielles d’un territoire en s’inspirant des cycles des écosystèmes naturels. Mais comment s’assurer que cette symbiose permette réellement une réduction des impacts environnementaux à l'échelle territoriale? Pour y arriver, il faut comprendre la pensée cycle de vie, via un de ses outils, l’analyse du cycle de vie (ACV).

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Par : Ana Carolina Oliveira, coordonnatrice en Économie Circulaire, Synergie Estrie-CLD Haut St-François.

et Bastien Roure, professionnel de recherche au LIRIDE (Université de Sherbrooke)

Pour nous adapter à la situation et trouver les meilleures solutions, il est évident que nous devons tous faire preuve de résilience, de flexibilité et de courage. L’arrêt obligé pour certaines entreprises ou le ralentissement forcé pour d’autres, en raison de la situation de santé publique actuelle, s’avère un excellent moment pour elles de réfléchir à leurs manières de fonctionner et à la provenance de leurs matières premières.

Sur une planète aux ressources fixes, notre modèle économique linéaire a atteint ses limites. Il faut donc découpler le bien-être de la société des impacts sur l’environnement. Contrairement au modèle économique actuel, le nouveau modèle économique qu’on appelle économie circulaire se définit comme suit :

« Un système de production, d’échange et de consommation visant à optimiser l’utilisation des ressources à toutes les étapes du cycle de vie d’un bien ou d’un service, dans une logique circulaire, tout en réduisant l’empreinte environnementale et en contribuant au bien-être des individus et des collectivités[1] ».

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Avec la pandémie, l’économie circulaire est plus que jamais à l’ordre du jour pour offrir plus de garanties aux entreprises. Les organisations et territoires sont donc appelés à sélectionner et à adopter, en fonction de leur contexte et du type de ressources, une ou plusieurs des douze stratégies de ce modèle. D’abord, les stratégies qui visent à réduire la quantité de ressources vierges consommées seront privilégiées (réduction à la source, etc.). Ensuite, les stratégies qui visent à intensifier l'usage des produits et celles qui cherchent à allonger la durée de vie des produits seront mises de l’avant (réutilisation, réparation, économie de fonctionnalité, économie collaborative, etc.). Enfin, les stratégies qui donnent une nouvelle vie aux ressources seront utilisées (recyclage, valorisation, etc.).

Parmi les douze stratégies de l’économie circulaire on retrouve la symbiose industrielle qui se voit comme une des meilleures options pour une relance rapide après la crise. Cette stratégie vise à soutenir le maillage d’acteurs du territoire, tisser de nouvelles relations entre les différents partenaires locaux, donc dynamiser l’économie régionale, pour permettre aux entreprises d’optimiser les flux de matière et d'énergie à l'échelle du territoire en développant des synergies.

Mais comment ancrer l’économie circulaire plus concrètement dans un contexte de durabilité dans des entreprises qui n’ont pas encore l’expertise pour le faire?  Est-il toujours préférable de boucler la boucle? Quels sont les bénéfices ou impacts environnementaux de cette symbiose? Quid des effets rebond? Ces questions ne sont pas assez souvent posées lors de la création des maillages. C’est à ce moment que la pensée cycle de vie, via un de ses outils, l’analyse du cycle de vie (ACV), permet de fournir des réponses à plusieurs questionnements.

D’abord il faut comprendre le rôle de l’ACV comme outil d’aide à la décision dans la mise en œuvre de l’économie circulaire. L’ACV, via l’identification d’impacts insoupçonnés et grâce à deux de ses caractéristiques, holistique (approche globale) et multicritère (voir figure 1), permet d’éviter les déplacements de problèmes environnementaux autant d’une étape du cycle de vie à une autre que d’une région géographique à une autre ou encore d’un milieu à un autre.

Par exemple, imaginons un cycle de vie d’un produit, depuis l’extraction des ressources, fabrication, distribution, utilisation et gestion en fin de vie. Considérons que ce produit engendre beaucoup d’impacts lors de la phase de fabrication, on demanderait donc aux concepteurs de ce produit de trouver des solutions pour réduire les impacts de cette phase et l’ACV interviendrait alors dans le but de quantifier cette réduction d’impact mais aussi d’identifier si jamais un déplacement d’impact pourrait se produire vers l’amont, soit de l’acquisition des ressources ou l’aval, dans un produit difficilement recyclable ou valorisable.

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Figure 1 – Les concepts de l’ACV

Mais alors en quoi l’ACV peut jouer un rôle dans la mise en place de l’économie circulaire? Tout simplement parce que la quantification des impacts du cycle de vie permet d’éviter qu’une stratégie d’économie circulaire qui semble à première vue pleine de bon sens ne soit finalement pas la meilleure des options pour une réduction optimale des impacts environnementaux globaux. Comme présenté ci-dessus, l’économie circulaire suit largement les principes des 3RV-E en privilégiant la réduction à la source avant la réutilisation, le recyclage et la valorisation des matières résiduelles qui se retrouve dans la Politique de gestion des matières résiduelles de la Loi sur la qualité de l’environnement. Cette même politique connait les risques d’une application à l’aveugle de ces principes puisqu’elle mentionne qu’il peut y avoir une dérogation à la hiérarchie établie si une analyse basée sur l’approche cycle de vie en démontre la pertinence. C’est en ce sens que la complémentarité des deux approches permet de garantir d’atteindre leur objectif commun qui est la réduction des impacts environnementaux. Les exemples de combinaison sont nombreux dans la littérature, une d’entre elle sur l’identification de voies de valorisation de résidus organiques a permis de vérifier et quantifier les avantages de certaines stratégies d’économie circulaire.

Tous les moyens sont disponibles pour une relance verte dès aujourd’hui, la plus grande difficulté est dans l’arrimage d’un nombre d’acteurs suffisant. Cependant, les ressources d’accompagnement tels que les Synergie Estrie et le LIRIDE sont disponibles pour une réussite de la transition.


[1] Pôle d’action québécois de concertation sur l’économie circulaire.

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