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La mystérieuse maladie qui attaque les chauves-souris de l’est de l’Amérique du Nord, de la Virginie jusqu’au Québec, fait tellement de ravages qu’elle pourrait conduire à l’extinction de la plus grande dévoreuse d’insectes du monde, la chauve-souris brune, d’ici 16 ans.

La maladie est appelée « syndrome du museau blanc » depuis son identification au printemps 2006 : des biologistes ont découvert dans le sud de l’État de New York un grand nombre de chauves-souris mortes dans les cavernes où elles hibernaient. Leurs museaux et leurs ailes étaient recouverts de petites taches blanches (comme sur la photo) qui se révélèrent être un champignon.

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Depuis, cette maladie aurait tué plus d’un million de chauves-souris. On ignore toujours comment ce champignon (Geomyces destructans) se répand. En fait, les scientifiques ne sont même pas certains si ce champignon est le vrai coupable, ou juste un microbe qui profite de la situation. Mais la cause de la mort des chauves-souris, elle, est connue : pendant leur hibernation, les chauves-souris se réveillent beaucoup plus souvent qu’elles ne le devraient —une fois aux quatre jours environ— et gaspillent trop vite leurs réserves de graisse. Quand arrive le printemps, elles sont émaciées, ou mortes.

Dans l’édition du 6 août de la revue Science, la première étude du genre sur ces populations prédit que, si la tendance se maintient, la petite chauve-souris brune pourrait disparaître d’ici l’an 2026 de l'est de l'Amérique du Nord. Et si ça peut sembler une bonne nouvelle pour ceux chez qui la chauve-souris ne provoque que des frissons, il faut se rappeler que cet animal est le plus puissant insecticide du monde : il peut consommer la moitié de son poids en insectes... chaque nuit!

Par conséquent, que se passerait-il si ces chauves-souris disparaissaient? Eh bien les insectes, incluant ceux qui ravagent des cultures et les moustiques qui nous irritent tellement, auraient la vie plus facile! Winifred Frick, de l’Université de Boston, résume cela ainsi, à l’émission Science Friday :

Nous sommes en quelque sorte au milieu d’une terrible expérience naturelle sur ce qui se passe lorsque vous retirez une espèce très abondante, qui joue un rôle important en terme de services rendus à l’écosystème...

Les chauves-souris se rassemblent par milliers dans des cavernes pour hiberner : c’est là que la maladie se répand à grande vitesse. Et elle continue de s’étendre vers le nord et l’ouest : on a signalé un cas pour la première fois au Québec en avril dernier.

Curieusement, le champignon est connu en Europe depuis les années 1980, où il n’a pas cet impact dévastateur chez les chauves-souris.

Les humains ne courent aucun risque, mais une théorie veut qu’ils soient les transmetteurs de cette maladie : certains États ont décidé pour cette raison de fermer des cavernes au public, dans l’espoir de limiter la transmission du pathogène.

L’équipe qui publie dans Science s’est appuyée sur 30 années de données des populations de 22 cavernes dans 5 États. C’est en remontant longtemps avant l’apparition du syndrome du museau blanc qu’elle a pu se faire une idée des variations normales et ainsi, tenter de déduire les dégâts futurs imputables au champignon. Dans le scénario du pire, où 45% des chauves-souris continuent de mourir chaque hiver, la probabilité d’une extinction à l’échelle régionale —le nord-est de l’Amérique— est de 99%. Dans le scénario le plus optimiste —10% de décès par hiver— elles ont un répit jusqu’à la fin du siècle.

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