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Même la pire marée noire de l’histoire des Amériques n’a pas réussi à provoquer un virage vert. À Washington, le projet de loi sur le climat et l’énergie, que les autres pays attendaient depuis sept ans, a été balayé sous le tapis le 22 juillet. À Ottawa, le scénario catastrophe d’une marée noire similaire au large de Terre-Neuve, n’a provoqué aucun soubresaut. Pourtant, les observateurs semblaient convaincus que, cette fois, les astres étaient alignés.

Il est temps que les gouvernements donnent aux énergies nouvelles une petite fraction de ce qu’ils donnent en subventions à l’industrie pétrolière, écrivait en juillet, dans une lettre publiée par plusieurs journaux, Andrew Sharpless, président d’un groupe de protection des océans... et fermement opposé aux forages pétroliers en mer. Au même moment, une enquête du groupe financier Bloomberg tapait sur le même clou : les gouvernements auraient versé l’an dernier 557 milliards$ à l’industrie des carburants fossiles (crédits d’impôt, subventions directes et indirectes)... contre 45 milliards$ aux énergies alternatives.

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Mais en définitive, ce type d’argument n’aura pas eu l’impact que ses auteurs espéraient. Plusieurs observateurs —journalistes, blogueurs et universitaires— ont blâmé pour cela « les forces du statu quo » (voir l'autre texte). Pourtant, ce sont ces mêmes observateurs qui, au début de la marée noire en avril, jugeaient que le contexte n’avait jamais été aussi encourageant :

« Pathétique »

Mais en bout de ligne, le projet de loi sur l’énergie et le climat, qui avait été adopté par la Chambre des représentants en juin 2009, est donc mort au feuilleton le 22 juillet, les sénateurs s’avérant incapables d’aller chercher les voix nécessaires. Voyant venir cet échec, l’auteur et chroniqueur Thomas Friedman le qualifiait de « pathétique ». Andrew Revkin le résumait plus philosophiquement quelques jours plus tard :

Le 20e siècle a pris fin vendredi, du moins pour ce qui est du discours sur ce qu’il convient de faire face au réchauffement planétaire. La fin est venue avec l’échec au Sénat d’un effort de sept ans pour faire passer une loi sur le climat centrée sur un système de bourse du carbone (cap and trade) pour réduire les émissions de gaz à effet de serre.

Au Canada, rien d’aussi dramatique : le seul soubresaut a été, en juin, le rejet par le premier ministre Harper de la suggestion de ses fonctionnaires d’éliminer les allègements fiscaux à l’exploitation pétrolière. Un comité sénatorial a bien conclu, en juillet, qu’une taxe au carbone ferait consensus dans le monde des affaires mais paradoxalement, notait Le Devoir , ce comité ne dressait pas « le moindre portrait du potentiel des filières vertes », se contentant de s’intéresser aux sables bitumineux.

Et le local?

What’s next? À défaut de faire bouger les élus de Washington ou d’Ottawa, l’été a renforcé l’idée que, en Amérique du Nord du moins, tout repose sur les élus régionaux. Le 27 juillet, la Western Climate Initiative, une coalition née en 2007 de 2 États américains, dont la Californie et de 3 provinces canadiennes, dont le Québec et l’Ontario, publiait sa stratégie de réduction de gaz à effet de serre, notamment au moyen de la création d’une bourse du carbone; celle-ci doit naître, en théorie, en janvier 2012, mais tout n’est pas encore ficelé.

Parallèlement, des quatre coins de l’Amérique du Nord, des projets locaux de parcs éoliens provoquent beaucoup plus d’enthousiasme que de résistance : en une seule semaine de juillet, rien que dans l’État de New York, trois futures tours ont fait la Une, deux privées à Geneva, non loin du lac Erie, et une universitaire à Oswego, non loin du lac Ontario.

Là où ça bloque, c’est quand le projet est trop gros pour être financé par des intérêts locaux, et nécessite donc des fonds fédéraux. Au Canada, le programme écoÉnergie, lancé en 2007, est moribond, faute d’argent neuf dans le budget fédéral de l’hiver dernier. Aux États-Unis, écrit Andrew Sharpless, cité au début de cet article, le premier projet d’éoliennes off-shore de l’histoire de l'Amérique, à Cape Wind, Massachusetts, qu’on croyait avoir été approuvé officiellement en avril, reste empêtré dans un processus administratif. « C’est une histoire de chien qui court après sa queue »:

Bien sûr, tous les projets d’énergie éolienne off-shore nécessitent une analyse environnementale rigoureuse. Rétrospectivement toutefois, plusieurs des préoccupations au sujet de l’impact des éoliennes en mer —incluant les préoccupations esthétiques et sonores— semblent dépassées, à côté des gigantesques nappes de pétrole qui noircissent le Golfe du Mexique.

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