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La pandémie a été lucrative pour les groupes antivaccins. Les deux plus influents des États-Unis ont vu leurs revenus plus que doubler entre 2020 et 2021. Ils ont beau être, officiellement, des organismes à but non lucratif, l’un d’entre eux a pu payer un salaire d’un demi-million de dollars par an à son directeur. 

Cette croissance avait en fait commencé avant la pandémie, mais celle-ci a été pour ces groupes une opportunité. Et grâce à cette croissance des revenus, s'est ajoutée une expansion de leur rôle politique, résume le magazine Politico dans une série de reportages. « Plus de fonds [leur] permet d’accroître leurs publics, de poursuivre en justice des agences fédérales et d’organiser des activités militantes. » 

Le premier de ces groupes, Informed Consent Action Network, déclarait des revenus de 1,4 million$ US en 2017. En 2021, il atteignait un sommet de 13,3 millions$. Son fondateur anime une balado qui, au plus fort de la pandémie, était diffusée sur un rythme presque quotidien et rejetait autant les vaccins que les masques et les mesures sanitaires, tout en faisant la promotion de traitements douteux contre la COVID.

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Le second, Children’s Health Defense (CHD), a vu ses revenus croître de 1 million$ en 2018 à 15 millions$ en 2021, selon ses déclarations d’impôt fédérales. Mais ce dernier chiffre n’inclut pas les revenus des divisions régionales, dont la plupart ont été créées depuis 2020. C’est dans ce contexte que le directeur, l’avocat Robert F. Kennedy Jr, a vu son salaire passer de 131 000$ en 2017 à 345 000$ en 2020 et à 500 000$ en 2021 et 2022. 

Informed Consent Action Network (ICAN), décrit Politico en citant le fondateur de l’organisme, « a été capable d’embaucher davantage d’avocats et de scientifiques et d’avoir une équipe qui a plus que doublé, comparativement à avant la pandémie ». CHD a « étendu ses opérations » en Europe, au Canada et en Australie, en plus de traduire son matériel dans d’autres langues. 

L’embauche de scientifiques a pour but de donner une apparence de crédibilité aux actions de ces groupes —l’important n’étant pas que ces scientifiques aient publié des études ou qu’ils soient des spécialistes, mais seulement leur statut de « scientifique ». L’embauche d’avocats a quant à elle pour but de contester des décisions d’agences gouvernementales comme le Centre de prévention des maladies (Centers for Disease Control) ou l’agence chargée d’approuver les nouveaux médicaments (Food and Drug Administration). 

ICAN a par exemple déposé une poursuite pour contester l’approbation aux États-Unis de la dernière version du vaccin contre la polio. De telles actions ont peu de chances de succès, selon les juristes interrogés par Politico, mais elles « grugent du temps et des ressources de ces agences, et fournissent du carburant aux efforts de relations publiques de ces groupes ». 

Quant à leurs argumentaires post-pandémie, ils sont les mêmes que pré-pandémie: des « mythes de longue date propagés sur les vaccins précédents », jamais étayés par des preuves, des études ou des données, sont utilisés pour « questionner » les vaccins contre la COVID. Et des citoyens qui, en 2021 ou 2022, ne questionnaient que les vaccins contre la COVID, y ont découvert une « porte d’entrée dans le plus large mouvement antivaccin ». 

C’est un mouvement politique particulièrement fort à droite du spectre idéologique —et qui a pris de l’ampleur, du moins aux États-Unis, au sein du parti républicain: « avant 2020, les sondages montraient peu de différences le long des lignes partisanes sur des enjeux liés à la vaccination… Mais depuis la COVID, les électeurs républicains ont divergé de tous les autres. » 

Un reportage du magazine Newsweek l’avait noté dès 2021: si la mouvance antivaccins la plus bruyante avait longtemps été le fait de militants de gauche s’inquiétant d’un lien avec l’autisme, elle a gagné en importance politique « à droite », en particulier en se présentant comme un mouvement de défense des « libertés individuelles ». En décembre 2022, une enquête de la Fondation Kaiser rapportait qu’uniquement du côté des parents, entre 2019 et 2022, la proportion de républicains opposés à l’obligation d’une vaccination infantile était passée de 20% à 44% —alors qu’elle était restée sensiblement la même chez les parents démocrates. On n’en est donc plus à une simple opposition idéologique à la vaccination contre la COVID, mais à un risque de guerre idéologique contre la vaccination en général.   

Au Canada, c’est un groupe d’électeurs qui a été plutôt remarqué du côté du plus marginal Parti populaire lors des élections de 2021. Mais la question de son impact sur les prises de position du Parti conservateur se pose depuis cette date et reste, à ce jour, une variable inconnue.

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