
C’est une des plus grosses bases de données du monde sur la santé publique: elle suit l'évolution, dans 90 pays, de chiffres aussi divers que ceux sur la mortalité infantile, la malaria, la tuberculose ou la nutrition. Elle a été citée 345 000 fois dans l'écosystème de la recherche. Mais elle est à risque de ne plus être mise à jour pour la première fois depuis 40 ans, à cause des coupes des États-Unis à leur agence d'aide au développement (USAID).
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Pour plusieurs pays, le Demographic and Health Surveys (DHS) « était l'une des rares sources fiables de micro-données pour informer les politiques et suivre l'évolution de la santé, tout spécialement des femmes et des enfants », commente dans la revue Nature le chef-statisticien de l'UNICEF, Pedro Azevedo. Le fait de prioriser ou non des interventions dans des pays en voie de développement a souvent été basé sur les données de DHS.
L’USAID soutenait ce programme depuis 40 ans. Elle lui avait attribué l’an dernier une subvention de 236 millions$ sur cinq ans. Or, l’un des premiers gestes du nouveau gouvernement Trump a été de couper la grande majorité des subventions de l’USAID, mettant virtuellement la clef dans la porte de cette agence.
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Un groupe de travail de la Commission statistique de l’Organisation des Nations unies est en ce moment à la recherche de partenaires financiers, incluant des mécènes comme la Fondation Gates. Mais un des enjeux, pour que des investisseurs acceptent de s’impliquer, est de déterminer qui est propriétaire de ces données.
L’USAID en avait confié la collecte et la gestion à la firme de consultants ICF International, basée en Virginie, incluant la gestion de la plateforme en ligne. Résultat, depuis le retrait de l'USAID, il est impossible à un nouvel usager de se créer un compte: seuls ceux qui en avaient déjà un continuent d’y avoir accès, pour l’instant.
Cette situation illustre la fragilité des bases de données scientifiques à l'ère du numérique : déjà, les remous causés par les coupes à Washington faisaient craindre pour l’avenir des bases de données gouvernementales portant sur des sujets entrant en conflit avec les priorités du nouveau gouvernement, comme les changements climatiques. Mais lorsqu'il s'agit d'une base de données gérée par des intérêts privés, c'est encore plus flou: le propriétaire pourrait la rendre payante, ou il pourrait la rendre rapidement obsolète, faute d’une continuité dans les mises à jour…