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S’il n’est pas anormal de trouver deux génomes dans le même être vivant —c’est notre cas— une algue vient en revanche de battre un record, avec sept génomes différents.

Dans notre cas, c’est ainsi qu’on parle de la mitochondrie, un composant (ou organite) de toutes nos cellules: elle possède son propre bagage génétique, distinct du nôtre. Il s’agit probablement d’un héritage remontant à 3 milliards d’années, lorsqu’une bactérie s’est « invitée » dans un autre être vivant et qu’elle y est restée. Elle remplit des fonctions indispensables au bon fonctionnement de la vie sur Terre, qui serait très différente aujourd’hui si la mitochondrie n’était pas intervenue.

On observe aussi un ménage à trois génomes chez les plantes: les cellules végétales ont vraisemblablement acquis la capacité à faire de la photosynthèse grâce à une cyanobactérie arrivée il y a un milliard d’années, et qui est devenue aujourd’hui ce qu’on appelle le chloroplaste. Tout comme la mitochondrie, le chloroplaste possède un petit groupe de gènes qui lui sont propres.

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Mais avec l’algue C. gyropyrenoidosa que décrit cette semaine une étude parue dans Current Biology, on passe à une autre catégorie. Une « communauté complexe » comportant deux bactéries, dont une abritant elle-même un virus.

Il s’agit d’une algue unicellulaire du groupe des cryptomonades, qu’on retrouve un peu partout dans des bassins d’eau douce. Elle fait partie d’une collection à l’Université de Goettingen, en Allemagne, depuis plus de 50 ans, dont la lignée est cultivée depuis ce temps dans divers laboratoires. L’attention de la chercheuse principale, Emma George, de l’Université de Colombie-Britannique, avait été attirée vers ce spécimen après avoir lu une étude de 1988 qui révélait la présence de bactéries à l’intérieur de ces algues: elle avait donc voulu décoder les génomes de ces « invités ».

Déjà, on avait appris dans les années 1990 que les cryptomonades étaient de curieuses bestioles. Bien qu’elles ne soient pas des plantes, elles peuvent faire de la photosynthèse parce qu’elles ont « fusionné » avec un autre être unicellulaire, une algue rouge. Et comme cette dernière a conservé une version réduite de son noyau —là où sont cachés les gènes chez tous les êtres vivants dotés d’un noyau— cela signifie qu’elle a importé avec elle deux génomes: celui de son noyau et celui de sa mitochondrie. En ajoutant cela au noyau et à la mitochondrie de la cryptomonade, on arrivait déjà à quatre génomes.

Ce que la recherche publiée le 27 avril dans Current Biology ajoute, ce sont donc trois bagages génétiques de plus: deux de bactéries, et l’un d’un virus qui, bien qu’incorporé dans cette bactérie, se révèle en théorie être un bactériophage, c’est-à-dire un virus mangeur de bactéries. Comment peut-il se retrouver là, sans avoir « mangé » son hôte, n’est pas clair, mais il semble que cette cohabitation dure depuis au moins 4400 générations, soit depuis que ces échantillons ont été récoltés par l’Université de Goettingen.

Une hypothèse proposée par ceux qui ont commenté l’étude est que les conditions stables d’un laboratoire ont pu contribuer à maintenir un équilibre. Mais dans tous les cas, commentent ces mêmes experts, c’est un exemple comme quoi les « relations » entre « l’hôte, la bactérie et son virus » peuvent être encore plus complexes qu'on le pensait.

 

Images: La C. gyropyrenoidosa sous le microscope électronique / Source: Current Biology

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