Les craintes face aux saumons d’élevage ne sont pas nouvelles : on craint que, relâchés dans la nature, ces saumons ne nuisent aux saumons sauvages, voire ne prennent leur place. Plusieurs raisons sont invoquées : des chercheurs canadiens viennent de découvrir l'impact dévastateur d'un parasite.

Un pou, littéralement. On l’appelle un pou de mer (en anglais, sea lice). Connu depuis longtemps des biologistes, il est en train de devenir un des cauchemars de l’aquaculture : les experts avaient déjà constaté, dès 2001, qu’il infectait les saumons d’élevage adultes. Les jeunes saumons, parce que leur peau est encore trop mince, peuvent être plus souvent tués par ce parasite. Et l’étude dont il est question ici démontre que les jeunes saumons sauvages qui vivent à proximité des fermes d'élevage meurent plus souvent que les autres.

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Dans la nature, les jeunes côtoient rarement les adultes, partis parcourir les grandes mers du monde. Mais là où les saumons d’élevage s’évadent, jeunes et adultes se côtoient, et ce que cette étude semble démontrer, c’est donc un taux de décès chez les jeunes qui monte en flèche.

Dans certaines régions côtières de l’ouest canadien, les saumons sauvages pourraient carrément disparaître en quatre ans, si les fermes d’élevage des saumons ne sont pas déménagées. C’est du moins l’avertissement que lancent ces chercheurs dans Science.

Les éleveurs, eux, sont moins inquiets : l’Association des éleveurs de saumons de la Colombie-Britannique affirme qu’il n’y a aucun problème, puisque le pou de mer est présent « à l’état naturel dans tous les océans » et que les variations de décès observées par les chercheurs seraient des fluctuations naturelles.

Rien que dans l’archipel de Broughton, entre le Nord de l’île de Vancouver et la côte canadienne, on compte 20 élevages de saumons. Là comme ailleurs, l’aquaculture est une industrie en pleine croissance depuis plus de 10 ans, avec la demande croissante pour du poisson dans nos assiettes.

Les chercheurs, sous la direction de Martin Krkosek, de l’Université de l’Alberta, ont analysé des données sur la capture de saumons remontant jusqu'à 1970 et ont tenté à partir de là de bâtir un tableau de l’évolution des populations. Au fil du temps, disent-ils, seules les populations qui, dans leur jeune âge, n’avaient pas été exposées aux poux de mer, sont restées stables. Les autres sont en déclin. Et en déclin rapide : « si l’infestation se maintient, l’extinction locale est certaine ».

Et qu’en est-il ailleurs dans le monde? « Le pou de mer infecte les jeunes saumons ailleurs, près des fermes d’élevage, incluant sur la côte atlantique », poursuit Martin Krkosek. Les éleveurs poursuivent leurs efforts pour éradiquer ce parasite, mais entretemps, une proportion des saumons d’élevage continue, bon an mal an, de s’évader et d’aller infecter ses cousins dans la nature.

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