« L’autobus a un rôle prépondérant au sein de la gamme des transports en commun. Avec ses trajets diversifiés, c’est un complément essentiel au métro », relève Geneviève Boisjoly, candidate au doctorat à l’École de planification urbaine de l’Université McGill et coauteure de l’étude.
Après avoir pourtant gagné en popularité depuis deux décennies en Amérique du Nord, la fréquentation des autobus connaît un léger recul. Les chercheurs ont scruté à la loupe cette baisse d’achalandage entre 2002 et 2015 dans 25 grandes villes nord-américaines, dont Montréal, Toronto et Vancouver.
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Ils ont découvert que le volume de déplacements offert annuellement par des compagnies comme la Société de transport de Montréal (STM), s’avèrerait le facteur principal pour doper l’achalandage. Plus ce volume s’amoindrit — mesuré par le nombre de kilomètres parcourus par véhicule — moins nombreux sont les voyageurs.
En d’autres termes, résume la chercheuse, « plus de bus circulent sur une route et plus ils sont fréquents, plus les gens vont les prendre ».
Retards à répétition, faible fréquence et pauvreté du service : la liste des critiques des usagers est longue, particulièrement à Montréal. Un service qui apparait réellement défaillant lorsqu’on le compare avec celui des villes européennes.
Le faible prix de l’essence et la concurrence des transports alternatifs comme le Bixi ou Uber, ne seraient pas à blâmer. « C’est minime par rapport au volume de déplacement. Au contraire, la présence de modes alternatifs pourrait avoir une influence positive sur l’utilisation du bus. Pouvoir louer une Communauto l’hiver ou circuler en Bixi pourrait décourager l’achat d’une voiture. Cela diversifie donc les transports : ça ne détourne pas des bus », pense Geneviève Boisjoly.
La solution ne peut pas de toute façon provenir du seul abaissement du prix du billet de bus, ou du coût d’abonnement, comme l’avançait une précédente étude de la même équipe de l’Université McGill. Il doit y avoir une combinaison avec un service de qualité — ce que les agences de transport de Montréal et San Francisco parviennent à offrir (bon service et prix modérés) alors que celles de Toronto et New York offrent un excellent service, mais pour un prix plus élevé.
Martin Trépanier, professeur titulaire au département de mathématiques et génie industriel de Polytechnique Montréal, qui n’était pas impliqué dans ces recherches, salue le travail considérable de collecte de données. « Le point faible serait que ces données proviennent de sources disparates (recensement, étude des associations de transporteurs) et ne sont pas toutes alignées à la même année. Cela peut causer de petits biais d’analyse ».
À la lecture de l’étude, il faut aussi prendre garde à la taille du groupe d’observation. Pour Montréal, par exemple, seule la STM a été sélectionnée, excluant les autres sociétés qui représentent une part non négligeable des déplacements de la région.
Le chercheur souligne aussi que la plupart des données de la National Transit Database (aux États-Unis) et de l’Association canadienne de transport urbain sont produites par les opérateurs eux-mêmes : « les transporteurs n’ont pas tous la même façon de calculer leur achalandage. Certains ont des systèmes de comptage très précis, comme les systèmes de cartes à puce, certains travaillent sur des estimations à partir des titres vendus. Cela dit, je ne pense pas que ces limitations viennent entacher de façon majeure les résultats de cette étude. Il est clair que les déplacements en transport collectif sont fortement influencés par les investissements publics, ce qui se traduit par un nombre plus important de kilomètres d’infrastructure. »