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Dans certaines forêts boréales clairsemées, le couvert de lichens ressemble à un tapis neigeux : il reflète le Soleil qui, du coup, réchauffe peu le sol.

Il provoquerait un micro-climat dont l’impact sur son environnement nordique freinerait la régénération du peuplement forestier, lit-on dans une récente étude québécoise. « Le couvert de lichens aura une influence négative sur le climat de son écosystème. Plus il sera étendu, plus l’impression de perte de chaleur sera grande et plus la régénérescence forestière sera difficile », confirme Serge Payette, du Département de biologie de l’Université Laval, chercheur au Centre d’études nordiques et co-auteur de l’étude.

Les lichens, organismes de symbiose entre les algues et les champignons, prolifèrent sur les sols pauvres et ouverts à la lumière. L’effet d’albédo, ou réfléchissement du rayonnement solaire occasionné par la couleur claire de ces végétaux, contribue à maintenir une température plus froide au sol.

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Pour mieux comprendre ce qui se produit, l’équipe de recherche a mesuré pendant près de 20 ans, entre 1997 et 2015, la température estivale de trois milieux forestiers très différents au sein du Parc national des Grands-Jardins : une forêt fermée constituée d’épinettes et de sapins, une forêt ouverte (taïga) dotée d’un couvert d’arbres clairsemé et des zones de gélivasques — ou « cuvettes de gel » — avec de grandes colonies de lichens, mais sans aucun arbre.

Les données recueillies aux deux heures montrent que de grands écarts de température surviennent entre juin et août. La forêt ouverte ou taïga peut voir sa température s’abaisser de 26 degrés C alors que le milieu fermé gardera partiellement sa capacité d’effet de serre, minimisant la baisse de froid. Quant aux gélivasques, le froid peut plus facilement s’engouffrer et les périodes de gel peuvent durer jusqu’à 3 à 4 jours.

Les colonies de lichens vont y survivre, tandis que ce froid nuit à la croissance des arbres. « Le lichen va prendre sa place dans les ouvertures de la forêt et y rester, car il prolifère bien dans des conditions de croissance minimale » (sol pauvre, plus de froid, etc.), explique le chercheur.

Le Pr Payette remarque toutefois un léger recul des lichens vers le nord, un phénomène lié aux changements climatiques. « Les arbustes sont légèrement en expansion, car les précipitations et la température sont actuellement à la hausse, ce qui va augmenter la densité du couvert des arbres dans les régions nordiques », ajoute-t-il.

Des « trappes à froid »

Il s’agit de la synthèse de différents travaux et de contributions exceptionnelles de cette équipe, analyse pour sa part le titulaire de la Chaire industrielle CRSNG-UQAT-UQAM en aménagement forestier durable. Selon Yves Bergeron, « Cela montre ce qui se passe dans le Nord-du-Québec, qui s’explique en grande partie par les incendies forestiers qui ouvrent les forêts à d’autres peuplements », relève cet expert de la dynamique des écosystèmes forestiers et de la forêt boréale.

Car les feux marquent les limites nordiques de la foresterie de la forêt boréale dans cette région. « Il faut savoir que le feu entre en compétition avec les coupes. Et la forêt ne peut supporter les deux sur un même territoire », avance même le chercheur.

Les lichens vont y participer. « L’ajout de cet élément au sein de la pessière noire » (une plantation d’épinettes) va la laisser ouverte à la lumière « et ainsi, empêcher la régénération forestière. Les forêts ouvertes forment alors des trappes à froid, où le gel sera plus présent, ce qui rendra difficile la réinstallation des arbres ».

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