C’est un bruit reconnaissable entre mille. Il s’élève ces jours-ci dans différentes régions de l'Est des États-Unis et symbolise la période de reproduction des cigales. Incluant des espèces dont on dit que l’émergence n’est censée se produire que tous les 13 ou 17 ans. Ce qui, pourtant, ne serait pas si clair.
Il y aurait plus d’une douzaine de groupes de ces cigales « périodiques » de la famille des Cicadidae (Magicicada septendecim), qui réapparaissent régulièrement aux États-Unis, rapporte le Scientific American. Un groupe différent émerge chaque printemps, dans des régions géographiques distinctes. Et quelques espèces, connues sous le nom de cigales annuelles ou caniculaires (Tibicen canicularis), émergent plutôt chaque année, généralement en été.
Certaines des « périodiques » apparaissent donc après avoir passé jusqu’à 17 ans sous terre, où elles grandissant très lentement en se nourrissant de racines et en utilisant la température du sol pour régler leur horloge interne. Quand leur année désignée arrive, et que leur environnement atteint environ 17 degrés C, elles commencent à sortir de terre.
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Le moment où ces cigales sortent de terre n’est pourtant pas si clair : certains individus émergent avec un an d’avance sur leur groupe et d’autres, un an en retard – et même quatre ans. Les scientifiques ont observé de telles cigales précoces dès 1969, grâce à Henry Dybas, du Field Museum de Chicago. Un demi-siècle plus tard, ils restent ignorants des raisons qui poussent les unes à précipiter leur venue ou à la retarder. Il y aurait peut-être des individus qui se développent plus rapidement que le reste de leur cohorte. Ou bien les changements climatiques pourraient avoir une influence.
Les scientifiques ont également émis comme hypothèse que ces rares émergences précoces ou retardées les préserveraient des prédateurs. Reste que même si les oiseaux profitent amplement du garde-manger qui leur est offert, il reste tellement de cigales que leurs chances de se reproduire sont assurées. « Il y a des endroits où 100 000 à un million d’insectes par acre (ou arpent, soit 4000 m2) sortent du sol », explique l’entomologiste de Virginia Tech, Eric Day.
Et elles ne perturbent guère, sauf pour leur son parfois strident —seuls les mâles sont dotés de cet organe sonore destiné à attirer les femelles— et les petites carapaces qu’elles laissent derrière elles lorsqu’elles muent. Ces cadavres forment ce que les biologistes appellent une nécromasse qui va nourrir l’écosystème forestier.
Ces mêmes scientifiques pensent que les cigales américaines pourraient provenir de la même couvée datant d’environ 10 000 ans: toutes les cigales du monde auraient un ancêtre commun datant de millions d’années, mais les lignées américaines proviendraient d’une seule couvée. À mesure que le couvert forestier s’est modifié, les cigales auraient été isolées et auraient commencé à se distinguer les unes des autres et à former des cohortes différentes et plus petites.
Au Québec, les cigales indigènes possèdent plutôt un cycle de vie de deux à trois ans, de la ponte des œufs dans les arbres jusqu’à la sortie de terre et à l’envol, en passant par une période larvaire plus ou moins longue – de quelques mois à des années. Ces grands insectes mesurent de 25 à 50 mm de long et montrent un corps généralement noir, brun ou vert, avec des marques de formes et de couleurs différentes selon les espèces.