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Un coronavirus vieux de 20 000 ans peut-il encore nous apprendre quelque chose? Étonnamment, ça pourrait être comment mieux lutter contre celui qui nous préoccupe en ce moment. Ou contre les suivants.

Il y a un an et demi, seuls quelques experts auraient pu dire que « coronavirus » était le nom d’une famille de virus. Aujourd’hui, cette connaissance est passée dans la culture populaire; plusieurs personnes ont ainsi retenu que le SRAS (syndrome respiratoire aigu sévère) de 2002-2003 était lui aussi un coronavirus et que certains cas du banal rhume pouvaient parfois être causés par un coronavirus. Mais peu de gens réalisent que des coronavirus rôdent autour de nous depuis une éternité.

Sur les sept connus, celui dont la date de « transfert » d’un animal à un humain était jusqu’ici la plus ancienne était le HCoV-NL63. En se basant sur le rythme auquel les coronavirus acquièrent de nouvelles mutations, les généticiens ont pu estimer que ce virus s’était « séparé » de son cousin animal —pour devenir capable d’infecter des humains— il y a un peu plus de 800 ans.

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Se demandant alors s’il serait possible de remonter plus loin encore dans le temps, le biologiste de l’évolution David Enard, de l’Université de l’Arizona, a proposé il y a quelques années une technique différente. Plutôt que de fouiller les génomes des virus, cherchons l’impact qu’ils auraient pu avoir sur les génomes des humains.

C’est qu’il n’y a pas que le virus qui subit des mutations. La mutation idéale, pour un humain, serait celle qui le rend immunisé à ce virus, et qui sera transmise à ses descendants. Les scénarios observés jusqu’ici ne sont toutefois pas aussi simples: par exemple, une mutation fournissant une défense contre des virus modernes pourrait être déjà dans notre génome depuis très longtemps —c’est ce qu’Enard avait annoncé avoir découvert en 2018 dans la partie du génome que les Néandertaliens nous avaient transmise.

Ou encore, des allers et retours entre le système immunitaire de l’humain qui développe de nouvelles défenses et le virus qui développe de nouvelles armes, pourraient laisser une empreinte: si ces combats se sont étalés sur des générations, on devrait voir la version du gène offrant une résistance devenir de plus en plus répandue dans la population. Or, dans une recherche parue le 24 juin dans la revue Current Biology, c’est cela que décrivent le biologiste australien Yassine Souilmi et ses collègues (dont David Enard): ils ont fouillé dans l’ADN de 2500 personnes appartenant à 26 populations à travers le monde, des séquences génétiques que l’on sait être liées à la résistance aux coronavirus. Ils ont trouvé que 42 de ces gènes étaient plus dominants dans des populations d’Asie de l’Est. Concrètement, ce que cela signifie: il y a 20 à 25 000 ans, une épidémie causée par un coronavirus inconnu a frappé dans cette région. Et les humains de là-bas s’y sont adaptés —au point où « l’empreinte » génétique est encore visible aujourd’hui.

Le bémol derrière cette intrigante découverte est que la datation n’est pas une certitude. Calculer le rythme de mutation d’un virus, sur une période aussi longue, reste une science encore toute récente.

Mais quelle que soit l’ancienneté de ce virus, un tel combat entre notre système immunitaire et un coronavirus peut pointer vers des « armes » moléculaires qui, si elles ont servi jadis, pourraient servir aujourd’hui, ou du moins ouvrir des pistes au développement de futurs médicaments.

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