Lors du Sommet d’action sur le climat en septembre à New York, les dirigeants de plusieurs pays se sont engagés à être carboneutres d’ici 2050. Dans le cadre de la COP25 la semaine dernière, la présidente de la Commission européenne a présenté un « pacte vert », censé conduire les pays d’Europe vers la carboneutralité en 2050. Plusieurs interprètent ces annonces comme signifiant que ces pays n’émettront plus de gaz à effet de serre en 2050. Le Détecteur de rumeurs explique pourquoi ce n’est pas le cas.
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Zéro émission ou carboneutre d’ici 2050
« Zéro émission » signifie qu’on n’émet plus du tout de gaz à effet de serre. Carboneutre signifie que le CO2 et les autres gaz à effet de serre, qui continuent d’être produits, sont compensés par des actions en nombre suffisant pour obtenir un « bilan » de zéro.
Autrement dit, un pays devenu carboneutre en 2050 pourrait continuer d’utiliser des carburants fossiles, le temps d’achever sa transition vers les énergies renouvelables. En autant qu’il contrebalance cette consommation, par exemple en plantant des arbres, en améliorant le transport en commun ou en achetant des crédits de carbone.
L’horizon de 2050 fait suite au rapport publié en 2018 par le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), qui vise un bilan net de zéro au milieu du siècle, si l’intention est toujours d’éviter de dépasser le seuil des 2 degrés Celsius d’augmentation de la température moyenne, par rapport à l’ère pré-industrielle.
Bémol: une liste qui exclut les gros pollueurs
Plus de 65 nations se sont engagées vers la carboneutralité d’ici 2050. Toutefois, cette liste n’inclut pas les plus gros pollueurs, soit la Chine, les États-Unis et l’Inde. L’Inde a annoncé qu’elle continuait ses efforts pour la production d’énergie renouvelable et la Chine a déclaré poursuivre sa croissance en misant sur de faibles émissions de carbone.
À l’autre bout du spectre, le Suriname et le Bhoutan, deux pays totalisant à eux deux moins de 1,5 million d’habitants, sont les seuls à obtenir une empreinte carbone… négative! Le cas du Bhoutan, un petit pays situé au pied de l’Himalaya, a d’ailleurs attiré l’attention de scientifiques australiens. Ce royaume connu pour ses monastères et ses paysages de montagnes, souhaite garder ce titre de «carboneutralité à perpétuité». Cependant, notent les chercheurs, le pays aura de la difficulté à conjuguer carboneutralité et croissance économique au cours des prochaines années.
Est-ce que la carboneutralité à l’échelle mondiale est atteignable? « C’est un objectif noble au point de vue de la planète, mais c’est politiquement difficile à réaliser », affirme Claude Villeneuve, directeur de la Chaire en éco-conseil à l’Université du Québec à Chicoutimi (UQAC).
En tout premier lieu, les pays riches, qui devraient montrer l’exemple et être des chefs de file, risquent de ne pas atteindre leurs objectifs d’ici 2050. Par exemple, le Canada a bien des devoirs à faire, car selon l’inventaire national des gaz à effet de serre en 2017, les émissions s’élevaient à « 716 mégatonnes (Mt) d’équivalent en dioxyde de carbone soit une diminution nette de 15 Mt ou 2,0 % par rapport aux émissions de 2005 ». Ce qui est encore très loin de l’objectif de 30% d’ici 2050 qui avait été fixé.
Une entreprise ou un individu peut aussi viser la carboneutralité
Le même calcul que font les gouvernements pour aboutir à la carboneutralité peut être fait par des compagnies et par des individus. Une compagnie minière, par exemple, pourrait minimiser à la source ses émissions de GES en utilisant des camions électriques.
Quant aux individus, ils peuvent calculer leur empreinte carbone sur le site de Carbone boréal de l’UQAC ou sur le site des Nations Unies. Selon la compilation du Global Carbon Project, un consortium de scientifiques créé en 2001, chaque Canadien avait produit en moyenne, en 2017, près de 16 tonnes d’équivalent CO2. En comparaison, cette moyenne était de 16,6 tonnes aux États-Unis, de 7 tonnes en Chine et de 6,9 tonnes pour les 28 pays de l’Union européenne.